RagTop – Spitalfields Finest



Dans la liste des marchés inévitables à Londres quand il s’agit de vintage, il y a Portobello market, dont on vous a déjà parlé, et il y a aussi Spitalfields market, mais le jeudi seulement.

Si il vous arrive de passer du côté de Liverpool Street station un jeudi midi, il y a des choses à ne pas rater. D’une, le sandwich chaud de chez A.Gold. Le magasin concentre tout ce qu’il y de plus anglais à manger : flapjacks, sandwichs froids au corned beef, scotch eggs, mais surtout des sandwichs chauds fait sous vos yeux avec en option une moutarde au chutney de mangue à tomber.

La deuxième chose, et sûrement la plus importante est le marché. Le jeudi, et le jeudi seulement, Spitalfields se transforme en marché vintage de haut niveau. Vintage américain de première qualité, workwear français, et des pulls marins anglais qui valent le détour. Il s’agit sans hésiter d’une des meilleures destinations de Londres si vous avez une idée bien particulière de ce que vous cherchez. Dave White a un des meilleurs stands. Ce monsieur expose justement sa collection chez Out of Town où avait lieu un débat des plus intéressants sur le vintage américain. La collection restera exposée jusqu’au 28 Mai. Vous pouvez avoir un aperçu de sa collection ici. Ou bien tout simplement y aller directement et casser votre tirelire.

A l’occasion du débat, Dave White nous a montré ses pièces préférées parmi celles qui étaient exposées. Vous pouvez les trouver ci-dessous. On vous laisse également avec quelques photos supplémentaires du marché. D’ailleurs, si vous y passer, faîtes un petit tour chez Albam et D.S.Dundee, qui ont leurs magasins juste à côté juste au cas où vous n’auriez pas trouvé ce que vous vouliez au marché.


Veste workwear PayDay


Sweat shirt customisé « Monza Maniaks »

 

Levi’s 501


Jeans à bretelles, Stronghold

 

Veste « de sport »


Levi's Vintage Clothing – La toile


Gamme brute Levi’s Vintage Clothing

Avec notre rapide aperçu du marché du denim premium, on avait souligné la pertinence de la démarche adoptée par Levi’s XX, la nouvelle entité premium de la marque américaine, distincte du géant Levi’s « red tab ». On en avait d’ailleurs parlé plus précisément par la suite, mais sans vraiment s’attacher à inspecter minutieusement quelques modèles.

Il ne suffit en effet pas vraiment de dire qu’un produit est différent pour qu’il le soit réellement et dans un secteur aussi concurrentiel que celui du denim, il fait bon disséquer quelques pièces pour comprendre leurs particularités.

On peut tout d’abord commencer par la matière. La matière d’un jean, c’est de la toile. Or, la toile de jean, c’est américain. Ce que l’on appelle « toile japonaise » est en fait un témoignage de l’amour que les japonais portent à la culture vestimentaire américaine : dans les années 80, quand il a fallu aux États-Unis produire plus et plus rapidement pour satisfaire une demande mondiale croissante, les géants américains du jean ont commencé à produire ailleurs, donc différemment de ce qu’ils avaient l’habitude de faire et le produit a perdu en qualité. Les japonais ont récupéré les machines américaines inutilisées et ont commencé à produire une toile de meilleure qualité que celle utilisée par les grandes marques. La toile japonaise c’est donc une des premières manifestation de la reproduction d’éléments textiles américains par les perfectionnistes japonais amoureux du vêtement.

Cone Denim – North Carolina

Seulement voilà, l’appellation « toile japonaise »  ne veut plus dire grand chose de nos jours: certaines ne sont même plus produites au Japon mais en dehors, à moindre coût, et gardent l’appellation car il s’agit d’une pâle imitation dont la volonté est d’être une toile de jean « façon toile japonaise ». Le tout dans un soucis marketing évidemment.

De ce constat, on peut pointer du doigt l’étiquette présente sur les jeans de la collection de Levi’s Vintage Clothing. Cone Mills est en effet le producteur de toile historique de Levi’s, qui a conservé les machines d’origine et qui tissent comme à l’époque des pièces du début du XXème. Levi’s Vintage Clothing a donc bien sa place sur la American List de Michael Williams : la matière vient des États Unis, elle est produite comme à l’époque et il s’agit d’une des plus belles toiles du monde (appelée « White Oak » du nom de l’usine).

Usine de tissage Cone Mills

Si certaines de ses autres pièces sont assemblées en Turquie, les jeans bruts en toile Cone Mills que propose la marque sont montés outre-atlantique, afin de satisfaire sa clientèle puriste, désireuse de retrouver le produit des années 50 et de coller à son ADN d’archiviste du vêtement américain.

Dans les articles qui vont suivre on va pouvoir s’amuser à continuer de remarquer le travail effectué par Levis Vintage Clothing pour reproduire les modèles d’époque jusque dans les moindres détails. Une fois que ce sera fait, les modèles phares de la marque n’auront plus de secrets pour vous !

The Vintage Showroom


La devanture du magasin au 14 Earlham Street à Londres

On compte surtout les marchés quand on parle de vintage à Londres : Spitalfields le jeudi, Portobello le vendredi, Camden le samedi et Bricklane le dimanche. Si on me demande c’est le programme que je suivrais. Quand il s’agit de boutiques, on tombe souvent sur un os : le prix. Les loyers à Londres sont chers et ça se ressent sur l’étiquette . Alors comment se démarquer de moult boutiques de vintage londoniennes qui proposent souvent tout et n’importe quoi pour des prix loin de raisonnables? The Vintage Showroom fait partie des exemples qui font bande à part de cette faune et propose réellement des produits de qualités, rares et même s’ils sont loin d’être gratuits, valent souvent le prix affiché.



Un aperçu de l’étage principal du magasin

Vintage de l’armée américaine, française ou anglaise en passant par de beaux exemples de chemises hawaïennes, des vestiges des heures de gloire de l’air preppy avec vestes en madras ou chinos d’époque sans oublier workwear français et grands noms du denim d’outre manche, le tout est réuni dans cette espace ouvert toute la semaine. Simon le manager et James, son assistant, sauront vous aider à trouver votre bonheur.

Pour ceux qui cherchent quelque chose de bien particulier, le sous-sol peut être rendu accessible sur demande. Le but de l’endroit est de montrer une sélection des belles pièces que Doug Gunn et son acolyte Roy Luckett gardent à l’écart des yeux du public pour le plaisir des professionnels du cinéma et de la mode.


Le sous-sol: ouvert uniquement sur demande

Lors de notre rencontre avec Doug, nous avons eu la chance d’apprendre en exclusivité qu’ils lanceront prochainement leur marque : F.W Collins, nommée d’après le magasin que la boutique a remplacé. L’avantage de ce nom est son histoire. Avec plus de 160 ans d’existence, le magasin a de quoi raconter une où deux anecdotes pour inspirer les futures collections de la marque. De leurs côté, avec 35 ans d’expérience cumulées dans le monde de la fripe, on fait confiance aux deux associés pour faire les choses bien. Les produits devraient être disponibles à la boutique pour le printemps prochain. Un peu de patience, on ne manquera pas de vous donner plus d’information dès que possible.



La plaque de F.W.Collins

Le clou du spectacle s’est déroulé le jour précédent, lorsque nous avons eu la chance de visiter le studio du Vintage Showroom. L’accès y est exclusivement réservé aux professionnels malheureusement, donc si vous voulez juste jeter un œil, ça risque d’être compliqué.

L’endroit recèle de trésors incroyables : Une Ursula suit réalisé par Barbour sur demande du Capitaine George Phillips, commandant du sous-marin HMS Ursula en 1937, est surement un des plus impressionnant. Vous n’aurez sûrement pas l’occasion d’en voir une autre de si tôt. Quand on sait que c’est de là que provient l’idée de la Barbour International portée notamment par Steve McQueen, ça laisse rêveur.



Doug Gunn


Plus on avance dans le showroom, plus nos yeux d’amateurs s’écarquillent, les pièces sont plus rares les unes que les autres et les prix le montrent bien. C’est beau, c’est rare, c’est inaccessible au commun des mortels que nous sommes, bref, c’est incroyable. Bienvenue au paradis du vintage.


Veste en camo reversible et Belstaff Trialmaster à la patine incroyable


Merci à Doug pour cette chance, on suivra le lancement prochain de F.W. Collins de très près, vous pouvez en être sûr.


The Vintage Showroom
14 Earlham Street
London, WC2H 9LN
t: +44 (0)207 836 3964
e: sm@thevintageshowroom.com

www.thevintageshowroom.com

Vente chez French Cancan

Arnaud Bauville, qui tient French Cancan et qui commente de temps en temps par chez nous, vend quelques unes des pièces de sa collection de vêtements vintage à ses lecteurs. Attention, on parle ici de pièces authentiques issues de la quête d’un passionné, pas de simple jolies secondes mains trouvées au hasard d’une friperie, ne vous attendez donc pas forcément à trouver des pièces aux coupes très contemporaines. Si vous avez des questions n’hésitez surtout pas à lui adresser directement un mail, il échange très facilement autour de son hobby.

Portobello Market – True Vintage

 

Je ne sais pas vous, mais on a un petit penchant pour les vieux trucs sur Redingote. Je parle de vêtement bien sur. Toujours est-il qu’il nous est parfois arrivé de chercher une veste d’une époque passée et de se retrouver face à des prix prohibitifs, et/ou pas des masses de produits de qualité.

La moitié de l’équipe vivant à Londres, nous avons fait pas mal de marchés, magasins spécialisés plus ou moins bien et un des meilleurs endroits est sans hésiter Portobello market. Certains de ces vendeurs sont de véritables puits d’informations, connaissent ce qu’ils vendent et peuvent même vous dégotter une perle rare du fond de leurs réserves à condition que vous sachiez ce que vous voulez.

Si le vêtement est ce que vous cherchez et que vous arrivez à ne pas succomber à l’odeur des gauffres, crèpes et autres cupcakes, filez directement tout au fond du marché sous le chapiteau blanc. Le vêtement d’occasion n’étant pas une science exacte, la marchandise disponible dépend des trouvailles de la semaine, donc hésitez pas à passer régulièrement pour ne pas rater les bonnes affaires.

Paul


Le stand de Paul


Les noms à retenir sont Paul, Chris et Doug. Ce sont nos 3 vendeurs préférés qui ont souvent les plus belles pièces. Doug a aussi une boutique sur Covent Garden qui s’appelle the vintage showroom où une propose une incroyable collection de raretés vintage si vous êtes prêts à mettre un peu plus au bout. Vous pourrez trouver chez ces vendeurs de l’équipement militaire américain et parfois français mais aussi des vêtements de travail et des pièces typiquement anglaises comme des Barbours ou des pulls de Guernesey.


Le stand de Doug


Après votre petit tour sur le marché, d’autres endroits valent le coup d’oeil. Un peu plus loin en vous éloignant du marché se trouve un marchand de tissu vintage où les couturiers/couturières pourront trouver leur bonheur en vue de dénicher de quoi faire une cravate par exemple. Le « King Falafel » est aussi un de nos arrêts préféré lors d’une visite au marché. Juste à côté du chapiteau, pour 5£ vous obtiendrez de quoi vous remettre d’aplomb et vous consoler de l’argent que vous venez de dépenser.

Le marché est ouvert du vendredi au dimanche. Le vendredi est le meilleur jour pour s’y rendre: peu de monde et les vendeurs viennent de déballer leurs marchandises. Vous pourrez ainsi parler plus librement avec eux et négocier en toute tranquillité.


Chris


Si vous ne trouvez pas votre bonheur, ça arrive, vous pouvez toujours vous rabattre sur le très bon Garbstore à quelques pas de là, et si le tourisme vous intéresse, il y a aussi le Travel Book Store qui a été immortalisé par « Coup de foudre à Notting Hill ». Bonne chasse! 

On vous laisse avec quelques autres images des vendeurs:


Doug, photo provenant du blog Mister Mort, jettez un oeil à ses photos de Portobello market ici


 


Flight jackets en peau retournée (2/2) – B-3

Type B-3


L’aura des flight jackets dépasse largement celle de toutes les autres pièces militaires. Pour moi, ce succès est tout autant le résultat des spécificités des vestes (simplicité, matériaux, praticité) que celui du métier de ceux qui les ont portés. En effet être pilote fait, et fera toujours rêver, plus particulièrement depuis l’époque des Spitfires. Ajoutons à cela que ces pilotes faisaient peindre des pin-up sur la carlingue de leur engins ainsi que sur leurs vestes, et vous obtenez la définition du « cool » à l’américaine. D’ailleurs Les flight jacket feront partie intégrante, au même titre que les jeans, du bagage culturel américain prêt à envahir l’Europe dès la fin de la seconde guerre mondiale.

Après avoir décrit le fameux bomber Irvin de la Royal Air Force, jetons un œil aux productions en peau retournée de l’armée de l’air américaine (appelée USAAC puis USAAF et qui deviendra finalement l’USAF en 47).


Commençons par la plus ancienne et la plus connue : La Type B-3. Ce blouson est l’équivalent américain de la Irvin et est entrée en service peu de temps après celle-ci, en mai 1934. Encore une fois sa fonction fut de protéger des pilotes des conditions extrêmes endurées en vol.

La B-3, tout comme la Irvin, est constituée de peau de mouton retournée. Pour les premières versions, cette peau fut conservée tannée telle quelle, sans application d’une couche supplémentaire de protection. Cependant leur fragilité poussa à traiter la surface extérieure de ces vestes. Tout d’abord avec une couche de protection dans les tons bruns/rouges (ce qui donna à ces vestes le surnom de redskins), puis par un vernis coloré brun foncé standard (ou seal brown) à partir de 1942, peu après l’entrée en guerre des Etats-unis. Le col de la B-3 est plus large que celui de la Irvin, celui-ci est en effet refermable par non pas une, mais deux sangles, et des boutons pressions permettent de le maintenir abaissé si nécessaire. Deux autres sangles sur les côtés permettent d’ajuster la taille, comme sur la USN Deck Jacket A-2. Une poche est cousue sur la droite afin d’y glisser éventuellement une carte, des gants ou même un paquet de cigarettes et une couche de cuir est ajoutée sur les manches pour plus de résistance. Le cuir ajouté sur la veste (sur les manches, pour la poche, pour les sangles et pour les coutures) étant d’une autre provenance que la peau retournée constituant la veste, on observe une différence de texture et parfois de ton entre ces éléments. Autre particularité de la veste, celle-ci n’a pas d’épaulettes mais possède à la place et pour la même fonction de petits carrés de cuir cousus aux épaules.

Aujourd’hui ce blouson a atteint le statut de pièce culte, et les deux sangles retombant du col, sont une particularité assez forte de la veste qui a inspiré beaucoup de créateurs, on les retrouve partout. Il semble que cela ait notamment inspiré Christopher Bailey pour la collection Burberry de cet hiver : ici et , une belle interprétation à mon goût. Cependant, d’autres blousons en peau retournée furent produits pour l’armée de l’air américaine. Moins célèbres que le B-3 ils présentent tout de même tous des détails originaux intéressants.


Type B-6 by Eastman Leather


Tout d’abord, la B-6 est un peu la petite soeur de la B-3. Entrée en fonction à la fin des années 30 et moins chaude que la B-3, elle servit de compromis entre celle-ci et la fameuse A-2. La fourrure y est d’ailleurs coupée plus courte. Ayant été conçue quelques années après la B-3, des améliorations ont été apportées : Des poches plus pratiques sont présentes, les sangles à la taille ont été remplacées par des zips sur les cotés, les manches se resserent grâce à un bouton pression, et des épaulettes ainsi que des soufflets apparaîssent. Le col, quant à lui, est plus fin que celui de la B3, et une seule sangle permet de le refermer. On peut dailleurs retrouver des B-3 vintages sur lesquels ont été installés un col de B-6, permettant aux aviateurs une meilleure visibilité lorsque remonté.


Type D-1 by Eastman Leather


Tout comme la Irvin, une version de la B-3 existe pour le personnel au sol, plus particulièrement les mécaniciens qui eux-aussi ont affaire à des températures parfois difficiles. La D-1 est faîte de la même fourrure courte que la B-6 et, tout comme cette dernière ne possède qu’une sangle autour d’un col. Plus courte, ses poches se ferment par des zips.


ANJ-4 by Eastman Leather


Finalement, la ANJ-4 est la dernière veste de pilote de l’USAAF conçue en peau retournée. Celle-ci fut distribuée à partir de 1943 pour remplacer la B-3. Elle ne le sera cependant que pendant moins d’un an pour être remplacée par une veste doublée. Résultat de l’expérience sur le front des pilotes américains, on remarque que sa forme se rapproche des flight jackets en cuir plus classiques. L’ensemble des manches, ainsi que le bas de la veste sont recouvert de renforts en cuirs pour des raisons de solidité. Des tricotines font aussi leur apparition au poignet, empêchant le vent de s’engoufrer dans les manches. Des sangles sur le côté permettent toujours d’ajuster la taille de la veste.

Aujourd’hui, de nombreux fabriquants proposent des répliques plus ou moins fidèles de ces vestes. Près de chez nous, il y a notamment Eastman Leather (distribué chez American Classics à Londres) et Aero Leathers (distribué chez Rocker Speed Shop à Paris) qui proposent de belles pièces.

Voici enfin quelques photos de la seconde guerre mondiale où figurent certaines de ces vestes.


B-6

 

B-3, A-2 et B-6


B-3 et B-6


B-3

Le Bar du salon du Vintage

En septembre dernier avait lieu la 6ème édition du salon du vintage à Paris. L’événement a rencontré un franc succès si bien que les organisateurs remettent ça en décembre avec « Le Bar » du salon du vintage, les 18 et 19 à la Cour du Marais. Cette fois ci l’accent est mis sur le côté festif avec un bar à bulle, des DJ et The Pompadours, un trio londonien de coiffeuses spécialisées dans les coupes des années 50.

Vous retrouverez également les exposants les plus importants du salon et pourrez à loisir flâner à la recherche d’une pièce, ce qui peut être assez arrangeant à l’approche de Noël si par le plus grand des hasards, comme chaque année, vous êtes en retard. Hahem.

Boardwalk Empire, côté vestiaire

L’engouement pour Mad Men en France, ça a quelque chose de vraiment étrange. On a d’abord l’impression que la presse française a découvert la série cet été, alors que la première saison a tout de même commencé en 2007. Ensuite les critiques vont quasiment toutes dans la même  direction alors que l’intrigue perd vraiment de la vitesse, et que si ça reste amusant à regarder, c’est sûrement grâce à l’esthétique de l’époque, aux femmes, et surtout aux costumes de chez Brooks Brothers mis en scène. Du coup Mad Men, même si Don Draper est un champion du style, on regardait un peu par défaut. En effet, dès que l’on recherche une série avec de beaux costumes, une ambiance travaillée, une intrigue captivante et une esthétique générale impeccable, l’offre tend à être très réduite.  Heureusement il y a quelque semaines, la relève est arrivée et on se rend compte que dès que les gros bonnets du cinéma commencent à s’en mêler, le monde de la série commence à passer aux choses sérieuses.

Évidement, pour ce qui est des costumes, il est sûrement très difficile de rater quelque chose dès que l’on s’intéresse à la Prohibition et aux années folles tellement l’époque est riche au niveau du textile: la série produite par Martin Scoresese et Mark Wahlberg, ça commençait bien, on savait déjà que rien n’allait être laissé au hasard.

Dans Boardwalk Empire, les personnages sont très travaillés et chacun d’entre eux voit ses traits de caractères, ses origines sociales et géographiques retranscrit dans les plis de ses vêtements. Les matériaux utilisés pour fabriquer les pièces nécessaires sont ceux que l’on trouvait à l’époque et John Dunn, le costumier, ne voulait pas utiliser des pièces issues de friperies. L’équipe aurait dû les restaurer et elles risquaient de paraître suspectes à l’écran. Il a donc fait appel Martin Greenfield, une sommité du monde des maîtres tailleurs, qui après avoir travaillé pour Brooks Brothers dans sa jeunesse, habillait entre autres Paul Newman et Bill Clinton. Ce grand monsieur du costume ne se contente d’ailleurs pas de ses gloires passées et entretient également des liens étroits avec Rag&Bone et Band of Outsiders. On peut avoir un aperçu de son atelier sur  The Selby, et c’est assez plaisant à regarder.

Pour commencer notre rapide tour d’horizon, nous allons commencer par le personnage principal. Interprété par Steve Buscemi, une des cartes des frères Coen (entre autres), Enoch « Nucky » Thompson est une sorte d’homme d’affaire qui est arrivé au sommet à la sueur de son front, en utilisant la force et la corruption, et il entend bien conserver les privilèges qu’il a réussi à obtenir. Comme la plupart des détenteurs de fortunes nouvellement acquises, il aime à faire remarquer son succès et sa réussite par des tenues tape à l’oeil, chatoyantes et luxueuses. On se rappelle surtout de Steve Buscemi dans des rôles de ratés ou de personnages secondaires, ici sous les feux de la rampe, on peut imaginer que ces costumes colorés compensent avec l’impression de faiblesse à laquelle renvoie son physique.  D’ailleurs vous aurez le plaisir de remarquer au fil des épisodes que ses costumes sont très souvent colorés et ornés d’accessoires qui rappellent son identité à ses interlocuteurs.

De stature tout à fait différente, on peut s’intéresser à Arnold Rothstein, ponte de l’alcool à New York, interprété par Michael Stuhlbar, encore piqué aux frères Coen. Ses costumes impeccables, assez sobres, rehaussés de quelques accessoires bien sentis en font l’un des personnages les plus élégants de Boardwalk Empire. Calme, éduqué, posé, violent, il a beaucoup de classe et sait manipuler les codes vestimentaires des classes sociales élevés pour ne pas en faire trop et passer pour un parvenu. Précisement ce qu’il peut manquer à notre ami Nucky.

Michael Shannon aka Nelson Van Alden, l’agent du « Federal bureau of internal revenue » n’est qu’austérité. Fanatique religieux, il prend son travail très à coeur et son costume, sans fioriture, ne lui sert qu’à travailler efficacement.

Le cas de Jimy Darmody est assez amusant, habillé au début de pièces tout à fait quelconques, on aura l’occasion de constater son ascension au sein du syndicat du crime italien lors de sa prise de mesure pour son complet bleu marine. À partir du moment où il aura revêti le vêtement, une véritable transformation s’opère et il deviendra l’un des personnages clés de la série. Interprété par Michaël Pitt, le rôle relancera sans aucun doute la carrière du jeune acteur.

Chalky White est un peu l’équivalent de Nucky Thompson au niveau de son style vestimentaire. Sûrement un des seuls noirs américain à avoir sa place dans les affaires à cette époque, il est très fier, et veut prouver son statut grâce à ses vêtements. On avait déjà croisé l’acteur dans The Wire où il jouait le rôle très réussi de Omar Little, un braqueur  semant la pagaille dans Baltimore. Sa garde robe ressemble beaucoup à celle de Nucky.

Bref, si vous cherchez un moyen de passer le dimanche froid qui nous attend au coin du feu, et de passer un bon moment, n’hésitez pas à vous pencher sur Boardwalk Empire. La série nous fait revivre le sentiment qu’on a pu éprouver en regardant Les Affranchis, Le Parrain II ou Il était une fois en Amérique et nous permet de nous délecter d’une esthétique poussée très agréable.

The Chap, la révolution par le Tweed

Outre manche, il se passe des choses formidables. Non contents d’avoir un héritage considérable en matière de vêtement et de développer quelques unes des jeunes marques les plus intéressantes ces dernières années, les anglais ont également cette capacité de tourner en dérision leur élégance. Le premier témoignage de cet état d’esprit un peu farfelu autour du vêtement, on s’y intéressait en traitant du Tweed Run il y a quelques temps: une course en vélo dans les rues de Londres, tout de Tweed vêtu. Il m’a été donné de rencontré le second au détour d’une friperie londonienne bien connue, lorsque j’apercevais des magazines à l’air vieillot posés sur une table. Les deux numéros de « The Chap » ont tout de suite capté mon attention: esthétique de revues des années 50, des looks incroyables sur les couvertures, des sommaires où l’on retrouve des mots comme « Cognac », « Land Rovers », « Steampunks », ou encore « Vintage Watches ». Le cocktail s’annonçait explosif.

De retour en France, c’est en découvrant le site de la petite publication que j’envisageai la partie immergée de l’iceberg. Plus qu’une simple parution presse toujours en activité, « The Chap » se veut véhiculer un véritable mode de vie et donner les instructions pour devenir un gentleman moderne à l’anglaise.

Faisant de leurs convictions stylistiques un véritable code de l’élégance véritable, les « Chap » croient en une révolution de la société par le Tweed et les bonnes manières que doit adopter celui qui en porte. Toujours appliqué avec dérision par les membres de ce cercle restreint, le manifeste des « Chap » résume parfaitement l’idéologie que prône cette communauté. Les commandements chap font l’objet d’une traduction sûrement approximative dans les lignes qui suivent, mais vous en saisirez au moins l’idée:

« 1. THOU SHALT ALWAYS WEAR TWEED. No other fabric says so defiantly: I am a man of panache, savoir-faire and devil-may-care, and I will not be served Continental lager beer under any circumstances.

1. Tu devras toujours porter du Tweed. Il n’y a pas d’autre tissu qui dise avec autant de fougue: « je suis un homme de panache, insouciant, sachant se tenir et l’on ne me servira de Continental lager beer sous aucun prétexte ».

2 THOU SHALT NEVER NOT SMOKE. Health and Safety « executives » and jobsworth medical practitioners keep trying to convince us that smoking is bad for the lungs/heart/skin/eyebrows, but we all know that smoking a bent apple billiard full of rich Cavendish tobacco raises one’s general sense of well-being to levels unimaginable by the aforementioned spoilsports.

2. Tu devras fumer constamment. Les cadres de « Healt and Safety » et autres praticiens médicaux continuent d’essayer de nous convaincre que fumer est mauvais pour les poumons/la peau/les sourcils, mais on sait tous que fumer une pipe remplie d’un bon tabac Cavendish élève le sens général du bien être à des niveaux inimaginables par les rabat-jois pré-mentionnés.

3 THOU SHALT ALWAYS BE COURTEOUS TO THE LADIES. A gentleman is never truly seated on an omnibus or railway carriage: he is merely keeping the seat warm for when a lady might need it. Those who take offence at being offered a seat are not really Ladies.

Tu devras toujours être courtois avec les femmes. Un gentleman n’est jamais vraiment assis dans un bus ou un train: il est toujours en train de garder la place à bonne température quand une femme pourrait en avoir besoin. Les femmes qui s’offusquent lorsqu’on leur offre un siège n’en sont pas vraiment.

4 THOU SHALT NEVER, EVER, WEAR PANTALOONS DE NIMES. When you have progressed beyond fondling girls in the back seats of cinemas, you can stop wearing jeans. Wear fabrics appropriate to your age, and, who knows, you might even get a quick fumble in your box at the opera.

Tu ne devras jamais, jamais, porter des « Pantalons de Nîmes ». Quand tu as passé l’étape de t’amuser avec les filles dans les sièges du fond au cinéma, tu peux arrêter de porter des jeans. Porte des tissus approprié pour ton âge et qui sait, peut être même que tu recommenceras dans ta loge à l’opéra.

5 THOU SHALT ALWAYS DOFF ONE’S HAT. Alright, so you own a couple of trilbies. Good for you – but it’s hardly going to change the world. Once you start actually lifting them off your head when greeting, departing or simply saluting passers-by, then the revolution will really begin.

Tu devras toujours te enlever ton chapeau. D’accord, tu possèdes quelques couvre-chefs. Nous sommes heureux pour toi mais ce n’est pas ça qui va changer le monde. Une fois que tu commenceras à le soulever de ta tête pour dire bonjour, au revoir, ou simplement pour saluer les passants, alors la révolution aura commencé.

6 THOU SHALT NEVER FASTEN THE LOWEST BUTTON ON THY WESKIT. Look, we don’t make the rules, we simply try to keep them going. This one dates back to Edward VII, sufficient reason in itself to observe it.

Tu ne devras jamais attacher le bouton le plus bas de ton gilet. Regarde, on ne fait pas les règles, on essaye simplement de les faire perdurer. Celle ci date d’ Edouard VII, c’est une raison suffisante pour la respecter.

7 THOU SHALT ALWAYS SPEAK PROPERLY. It’s quite simple really. Instead of saying « Yo, wassup? », say « How do you do? »

Tu devras toujours parler correctement. Il s’agit de quelque chose d’assez simple. À la place de dire « Yo mec, bien? », dis « Comment vas tu ? »

8 THOU SHALT NEVER WEAR PLIMSOLLS WHEN NOT DOING SPORT. Nor even when doing sport. Which you shouldn’t be doing anyway. Except cricket.

Tu ne porteras jamais de basket si tu n’es pas en train de faire du sport. Même pas si tu fais du sport. Ce que tu ne devrais pas faire d’ailleurs. Sauf du cricket.

9 THOU SHALT ALWAYS WORSHIP AT THE TROUSER PRESS. At the end of each day, your trousers should be placed in one of Mr. Corby’s magical contraptions, and by the next morning your creases will be so sharp that they will start a riot on the high street.

Tu devras toujours rendre hommage au presse pantalon. À la fin de chaque jour, tes pantalons devrons être rangés dans un des engins magiques de Monsieur Corby et le matin suivant tes plis seront si droit qu’ils déclencheront des émeutes sur les grands boulevards.

10 THOU SHALT ALWAYS CULTIVATE INTERESTING FACIAL HAIR. By interesting we mean moustaches, not beards.

Tu devras toujours cultiver les aspects intéressants de la pilosité faciale. Par intéressants nous voulons bien sûr parler des moustaches, pas des barbes. »

Ainsi encore une fois, quand il s’agit de s’habiller et de pousser leurs délires un peu loin, les anglais font preuve d’un savoir faire plus que certain.

Ayant vu le jour en 2000 « The Chap » soufflera bientôt sa onzième bougie. La période a d’ailleurs été choisi par l’éditeur Broché et les deux fondateurs du magazine, Gustav Temble et Vic Darkwood, pour éditer « Le manifeste Chap : Savoir-vivre Révolutionnaire pour Gentleman moderne » un recueil de leur savoir en français. Le livre est déjà disponible chez le plus grand libraire du monde et ornera forcément très bien votre bibliothèque. Ceux d’entre vous qui voudraient se pencher sur la version originale, sachez que le style si particuliers des auteurs n’est pas forcément très accessible mais ne manque pas d’un trait d’humour assez plaisant.

US Navy deck jackets – N-1 et A-2

USN Deck Jacket N-1

Continuons notre inventaire des pièces militaires cultes avec les vestes de pont ou Deck Jackets de la marine américaine. Comme leur nom le laisse imaginer, ces vestes étaient utilisées par les équipages lorsqu’il fallait intervenir sur le pont, en contact direct avec les éléments. Ces vestes se veulent avant tout pratiques, chaudes, et laissent à leur porteur la liberté de mouvement nécessaire à leurs interventions. On remarque que comme presque toujours sur les vêtements utilitaires, la forme suit la fonction, et c’est d’autant plus flagrant lorsque l’on compare ces vestes de ponts avec d’autre vestes de la défense américaine, comme les field jackets par exemple.

Le N-1 fut créée par la US navy en 44. Sa première version, fidèle au reste de la garde robe de la marine de l’époque, était bleu marine. Cette couleur fut rapidement changée en kaki afin de permettre aux soldats un meilleur camouflage. L’expérience des rudes conditions subies par la marine durant le début de la seconde guerre mondiale a permit d’aboutir à la création de ce veste, qui est un peu l’ultime veste de la navy US pour se protéger du froid.

Ce manteau possède des caractéristiques originales : sa doublure est en alpaga, procurant un confort assez rare sur les vêtements militaires. Un zip central ainsi qu’un rabat boutonné permet sa fermeture, ce qui donne au manteau une petite asymétrie charmante. Le col rond fourré en alpaga se relève et peut se fermer par une languette.

Les authentiques Deck Jacket N-1, comme beaucoup de pièces militaires, possèdent divers détails permettant de retracer leurs histoires : des pochoirs sont souvent visibles sur la poitrine et sur le dos, indiquant l’affectation et le nom du propriétaire original. De même, l’étiquette sur la doublure affiche la référence du fabriquant et le numéro de contrat permet de retrouver la date de fabrication.

La N-1 est entrée en service en 44, juste à temps pour entrer dans l’histoire et être utilisé sur les plages normandes lors du débarquement. Elle fut ensuite utilisée pendant une vingtaine d’année, avant d’être remplacé par la A-2. Bien qu’assez commune aux US, il est plutôt difficile de s’en procurer une en Europe aujourd’hui. Il est toujours possible de se tourner vers des reproductions japonaises, qui poussent le détail jusqu’à utiliser des zips deadstock pour être le plus fidèle à l’original possible (The Real McCoy’s ou Buzz Rickson).

La A-2 fut elle introduite à la fin des 50’s et fut distribuée jusqu’à la fin des années 90. La forme reste similaire à la N-1, une poche à rabat est ajoutée à la poitrine et des sangles sur les côtés permettent de la serrer aux hanches. L’alpaga a été remplacé par du synthétique et le col n’est plus fourré. Elle conserve néanmoins ses poignets élastiques, permettant d’éviter que le vent ne s’engouffre dans les manches comme cela se ferait avec un caban.

Ci-dessous une photo de la A-2 ainsi que des photos de la N-1 portée, par Paul Newman et par des marins américains.

USN Deck Jacket A-2



Paul Newman sur le tournage de « Somebody Up There Likes Me » en 1956