Veste en moleskine – LL Bean
Le workwear ayant eu ses heures de gloire récemment, on a beaucoup parlé de moleskine, la matière de référence pour le workwear français. Mais qu’est-ce que la moleskine?
Le nom moleskine vient de l’anglais « mole skin », qui signifie littéralement « peau de taupe » en référence au touché de la matière. Le dictionnaire Larousse en ligne définit la matière comme étant une « Étoffe de coton lustré, que l’on employait autrefois pour faire des doublures de vêtements » ou encore une « Toile vernie imitant le maroquin ou le cuir, constituée par une étoffe recouverte d’un enduit et d’un vernis. (Elle est utilisée en gainerie et en reliure.) ». Le mot décrit aussi un type de cuir tel que celui qui recouvre les carnets de la marque du même nom. Finalement, une ancienne définition de 1668 décrit la moleskine comme « désignant la fourrure de peau de taupe ou toute fourrure dont le rasage des poils lui donnerait un aspect semblable » élargit en 1803 à « surface du tissu étant rasée au cours de la fabrication de ce velours ».
Au cours de mes recherches, j’ai également regardé la définition dans l’Eternel masculin, de Bernhard Roetzel, qui renvoit la matière au velours. Bref me voilà perdu face à des définitions bien différentes, surtout que certains forums anglophones tel que askandyaboutclothes parlent de la moleskine vernie comme d’une hérésie. Alors d’où vient cette matière?
Des fabricants d’acier à Sheffield
Certaines sources parlent de sa première utilisation par les fabricants d’acier de Sheffield, en Angleterre, pour ses qualités protectrices : la matière étant tissée très serrée et ayant des « poils » courts, l’acier fondu glissait dessus, protégeant les ouvriers des éclaboussures. La moleskine était utilisée dans la fabrication de leurs pantalons mais aussi des tabliers.
Le tissu est de la famille des futaines, tissé serré et en coton brossé lui donnant un effet duveteux qui est ensuite tondu pour lui donner cet effet peau de taupe. Tout comme le jean, la matière est connue pour être solide et s’embellir avec l’âge avec l’avantage supplémentaire d’être chaude et donc adaptée pour l’hiver.
Comme le souligne Mr.Freedom dans son interview pour Hell’s Kitchen, ce qui fait la différence entre le workwear français et américain est l’utilisation de matières différentes: la moleskine pour les Français et le denim pour les américains.
Pantalon en moleskine blanc pour tailleur de pierre
En France, le vêtement de travail s’est développé à la fin du XVIIe siècle en réponse à l’évolution de l’industrie. Les vêtements étaient alors constitués de tissus en coton tissé de manières différentes tel que le velour, le satin et la moleskine. Ce n’est qu’au début du XXe siècle qu’Adolphe Lafont a eu l’idée de créer des habits adaptés à chaque profession avec pour exemple un pantalon en moleskine blanc et une veste en velour noir pour les charpentiers.
Un largeot en velour – Le Laboureur
Ce pantalon, du nom de largeot, s’est vu attribué une couleur différente selon la profession de celui qui le portait: écru pour les tailleurs de pierre et sculpteurs, noir pour les charpentiers et couvreurs et marron pour les menuisiers ou ébénistes. Les mécaniciens et chauffeurs se sont quand à eux vu dotés de la couleur bleue, d’où le nom « bleu de chauffe » pour décrire ce vêtement. Les teintures artificielles n’existant pas, l’indigo était utilisé pour teindre ces vêtements leurs donnant les mêmes capacités de délavage que le jean.
Comme l’a définie le Larousse, la moleskine était bien utilisée « autrefois » pour les doublures et encore aujourd’hui, notamment pour les poches de Barbour. Si vous vous étiez déjà demandé comme moi quelle était cette matière chaude et douce dans laquelle vous fourriez vos mains au moindre coup de vents cet hiver, nous voilà fixé!
Pantalon d’ouvrier en moleskine bleu – Le Mousquetaire
Pantalon en moleskine – Lambourne
Crédit photo: la vie en bleu de travail, Flickr, Google images