London Cloth – Steampunk Weaving

Daniel au travail, en plein coeur de Hackney à Londres

Un jour que l’on imaginera gris et brumeux parce que c’est comme ça que l’on rêve l’outre-Manche, Daniel Harris, un jeune anglais un peu fou, a trouvé de vieilles machines à tisser perdues dans une grange du Pays de Galles. Laissées à l’abandon depuis une trentaine d’années, elles avaient pourtant servi pendant des décennies. Persuadé que ces machines datant de la fin du XIXème en avaient encore sous le capot, Daniel a voulu les revoir fonctionner: il s’est mis en tête de les comprendre, les démonter, les remonter.

En garçon futé il a vite compris comment fabriquer du tissu et a décidé d’ouvrir une petite usine à Londres même et de le vendre à qui en aurait besoin. Ainsi naquit en 2011 London Cloth Company.


Un peu d’huile de coude et de mécanique et hop, on est Loro Piana en beta

Bonne réponse aux problématiques de designers qui cherchent à matérialiser une idée sans engager une grosse manufacture dans la fabrication de 300m de tissu, London Cloth Company semble vendre ses métrages sans minimas et travailler vraiment sur mesure. Si vous pouvez acheter des coupons de matière sur son site, Daniel ne rend pas simplement service aux amateurs de loisirs créatifs mais travaille pour de belles marques établies: Ben Sherman et Nigel Cabourn n’ont pas hésité à lui faire confiance.

Comme ça n’allait pas assez loin, Daniel Harris s’est dit que ça serait bien de réaliser aussi un tissu qui n’utiliserait que de la laine anglaise, chose que les anglais ont arrêté depuis longtemps: la majeure partie de la matière première utilisée par les fabriques de tissu ou de flanelle vient en général de Nouvelle Zélande et d’Australie. Il a donc commencé l’année dernière à construire son offre de Tweed anglais en collaboration un écologiste pour s’assurer que le processus soit le plus eco-friendly possible. London Cloth Company pousse le vice jusqu’à travailler avec les tondeurs de moutons: aucun des fils ne sera teint mais chacun des tissus sera élaboré en fonction de la couleur du troupeau pour réussir à trouver une homogénéité: on obtient une matière 100% naturelle.


Une idée le matin, un prototype le soir. De quoi faire vaciller le coeur de certains porteurs de projets…

Donc oui, si un de ces dimanches vous passez par une brocante ou vous fouilliez sur eBay et que vous trouvez de vieilles machines industrielles que vous avez envie de faire revivre sans rien y connaître, envoyez nous un mail, on mettra la main à la pâte.

Profitez en aussi pour aller voir leur page Facebook, Daniel propose des stages ou des visites de temps en temps. Aller se découvrir une passion pour le tissage pendant quelques mois ça doit être ça peut être assez tentant finalement…

www.londoncloth.com


On charge, direction Londres


Daniel a quand même rajouté un peu de technologie, soyons sérieux.



The Men's Dress Reform Party

Participants à un concours organisé par le MDRP, 1937 (source)

Tout observateur avisé de la mode masculine aura remarqué que les changements et évolutions s’y font de manière bien moins rapide et fréquente que pour la mode féminine, et que ceux-ci se résument souvent à des détails discrets. Selon John Carl Flügel, psychologue à University College of London au début du 20ème siècle, en parallèle de la révolution industrielle apparut ce qu’il nomma « le grand renoncement masculin » et qui suivit les hommes jusqu’à son époque (et la notre). Selon lui, les hommes « firent de leur tenues le plus austère et le plus ascétique des arts » : ils « abandonnèrent leur revendication à pouvoir être considérés beaux » et « du coup ne visèrent plus que l’utilité ». Si aujourd’hui nous jouissons d’une certaine liberté pour exprimer notre fantaisie vestimentaire, il en était tout autre à l’époque de Flügel : les hommes portaient encore et toujours leurs tenues sombres issues de la révolution industrielle.

Le début du 20ème siècle a vu le vêtement féminin évoluer radicalement : quasi-abandon du corset, premières robes lavables, les épaules et les mollets se montrent pour la première fois, les cheveux se portent courts et on pense enfin à son confort. Mais du côté des hommes l’apparition du sportswear n’atteignit que peu l’hégémonie du costume trois pièce en laine lourde. Une étude pesa les vêtements que portaient dans la rue les habitants de New York en juin 1929 : le poids moyen des tenues féminines était de 1,13 kg, tandis que celui des hommes approchait les 3,8 kg. Le vestiaire masculin eut tout de même à cette époque quelques changements positifs : abandon des sous-vêtement longs (non, je ne veux pas entendre parler des long-johns techniques de chez Uniqlo), remplacement des chemises et cols amidonnés par des versions souples, des chaussures hautes par des basses, et disparition progressive des chapeaux.

Ce n’était cependant pas suffisant pour le docteur Alfred Charles Jordan, un radiologiste anglais reconnu de l’époque, qui avait surtout la curieuse habitude de porter des shorts pour se rendre au travail, vêtement qui était à l’époque réservé aux scouts. Le radiologiste était membre d’une organisation prônant de nombreuses réformes de la société pour une meilleure santé générale : La New Health Society mettait en avant le rôle de l’exercice, de l’air frais, d’une bonne alimentation et de meilleures conditions de travail et d’habitation sur la santé. C’est donc dans cet environnement teinté d’eugénisme qu’il forma en 1929, accompagné de plusieurs intellectuels reformateurs britanniques (dont le pré-cité John Carl Flügel), le Men’s Dress Reform Party (le partie pour la réforme du costume masculin), qui s’évertua à changer radicalement la garde robe masculine de l’époque. Un véritable défi en somme.

L’organisation souhaitait avant tout faire bénéficier les hommes et leur santé du progrès : « le vêtement masculin a sombré dans une routine de laideur et d’insalubrité de laquelle il devrait être sauvé… Le vêtement masculin est laid, inconfortable, sale (parce que non lavable), insalubre (parce que lourd, serré et non ventilé). ». L’organisation recommandait une plus grande originalité dans le vêtement masculin, expliquant que celui-ci devrait relevé d’un style individuel plutôt que de l’uniformité contemporaine. Furent ainsi mis en avant les shorts et culottes, les chemises au col ouvert ou même les blouses, les matières plus légères et colorées telles que la soie artificielle ou la popeline. Les vestes étaient considérées comme superflues, on leur préférait des pulls en maille et surtout la cravate, qui empêchait le cou de profiter de l’air frais, était sévèrement combattue. Les chapeaux furent bannis, et les chaussures, ces « cercueils en cuir » devaient être remplacées autant que possible par des sandales. Un sacré effort d’imagination est aujourd’hui nécéssaire pour concevoir des gens parés de la sorte au milieu de la foule londonienne grisâtre de l’époque.

Le premier appel du partie fut fait à partir de Bedford Square en 1929 (le square même où ont aujourd’hui lieu les Chap Olympiads) et fut globalement relayé par l’ensemble de la presse nationale. L’organisation eu beaucoup de succès lors des premières années, si bien que fleurirent au total plus de 200 associations locales du Men’s Dress Reform Party partout au Royaume-Uni. L’organisation mis en place des soirées qui connurent un franc succès, afin « de donner à chaque homme la chance de paraître et de se sentir sous son meilleur jour, grâce aux vêtements qu’il fera évoluer pour cette occasion unique ». La soirée annuelle de 1930 reçut plus de 1000 participant, dont H.G. Wells, le fameux écrivain de La Guerre Des Mondes. Il fut ainsi possible de trouver, dans les commerces britanniques des années 30, des habits de réforme suivant les préconisations du MDRP. Ce fut par exemple le cas du fameux magasin de Regent Street Austin Reed. Le MDRP comptait aussi un magasin officiel et un service de vente par correspondance, qui connu un certain succès.

Souffrant d’une mauvaise image de la part de la presse professionnelle et des tailleurs en général, l’intérêt pour l’organisation s’essouffla et elle disparut finalement au début de la seconde guerre mondiale. Le MDRP nous laisse aujourd’hui une trace intéressante de l’époque, et des photos assez surprenantes de gentlemen aux tenues retro-futuristes, dont certaines que l’on pourrait très bien imaginer portées aujourd’hui (Thom Browne n’est pas loin).

L’histoire de l’organisation est détaillée par l’historienne de la mode Barbara Burman dans un chapitre de l’excellent ouvrage The Men’s Fashion Reader, consultable ici.

Uniformes des employés du service télégraphique conçues par le secrétaire du Men’s Dress Reform Party, le docteur Jordan, en 1937 (source)


Membres du MDRP en vêtement de réforme (source)

M&S – British Quality Goods

Michael Marks et Thomas Spencer, les fondateurs de Marks & Spencer

Marks & Spencer, pour beaucoup de français de notre génération, c’est ce magasin de sandwichs clubs, de plats préparés et de friandises qu’on a rencontré lors d’une visite à Londres. Du coup on peut être assez surpris lorsque ce dernier revient en France avec une boutique de vêtement. Les plus anciens, eux, se souviendront de l’époque où notre pays possédait de nombreuses boutiques Marks & Spencer. Celles-ci furent toutes fermées (peu après que Burger King ait fait de même, triste époque). Le coeur de métier de Marks & Spencer est bien le vêtement, d’ailleurs c’est le premier distributeur de vêtement au Royaume-Uni : il y détient à peu près 11% du marché. Pour information, en France – le pays de la mode – c’est Decathlon qui occupe cette place, avec plus de 3% de parts de marché.

Le magasin de Southampton au début du XXème siècle

L’histoire de Marks & Spencer remonte à 1884 où l’entreprise écumait les marchés du nord-est de l’Angletterre. Rapidement elle se spécialisa sur un concept à l’époque novateur : le magasin à prix unique. Marks & Spencer est donc un peu comme le grand cousin briton des distributeurs français Monoprix, Prisunic ou Uniprix. Tous les produits qui y étaient vendus étaient à 1 penny. Le succès et le développement furent tels que le réseau du distributeur comptait déjà 145 magasins en 1915. L’entreprise se diversifia petit à petit dans le vêtement, les produits de la maison, la nourriture, les cafés … Et devint enfin le Marks & Spencer d’aujourd’hui. La marque de vêtement vendue chez Marks & Spencer fut longtemps nommé St Michael, du nom du fondateur, il n’est donc pas rare de tomber sur des vêtements de cette marque dans les friperies anglaises ou françaises. Petite anecdote historico-financière : Marks & Spencer racheta Brooks Brothers en 88, avant de  revendre la marque américaine au fils du patron de Luxotica en 2001.

Un de leurs deux magasins de Oxford Street, à Londres en 1932

Un peu comme notre boutique La Belle Échoppe, Marks & Spencer avait une politique forte en terme de sourcing et proposait presque exclusivement des produits fabriqués au Royaume-Uni. Ils durent changer ceci au début des années 2000 car la concurrence gagnait des parts de marché en important des produits pour les proposer à plus bas prix. Depuis ses débuts, Marks & Spencer tente d’offrir à ses clients de la qualité à moindre coût, et la marque a longtemps été une icone des « British Quality Goods ». La marque a aussi collaboré à plusieurs reprises avec de grands noms de Savile Row pour sa gamme de formal wear. Elle a plus précisément travaillé avec des tailleurs de la nouvelle génération des années 90, que certains surnommèrent le New Bespoke Movement car ils brouillaient les pistes entre designer et tailleurs : Timothy Everest et maintenant Richard James.

La visite d’un magasin du distributeur peut être une expérience troublante car la segmentation des sous-marques et des produits est un peu confuse. D’autant plus que l’offre du distributeur est très large, il y en a en effet pour tous les goûts. L’expérience est cohérente sur internet, où les brushings des mannequins et les traductions un peu hasardeuses peuvent effrayer. Malgré ces lacunes, pour moi Marks & Spencer est un peu l’Uniqlo anglais, sans l’excellence marketing du japonais. Si on cherche bien, on y trouve de nombreux basiques de bonne facture, et aussi des classiques très anglais : des pantalons en velours côtelé ou en moleskine de multiples couleurs, des vestes de chasse type barbour, des vestes en Harris Tweed … Donc si vous arrivez à vous frayer un chemin à travers leurs 20 modèles de chinos différents (!), et que vous n’avez pas peur de tomber face à des choses étranges, vous pourrez très certainement dégoter une belle pièce, durable et accessible. L’enseigne va bientôt ouvrir de nombreux points de vente en France, l’occasion pour les curieux d’aller voir ça de plus près.

En cherchant un peu, on tombe rapidement sur des modèles basiques d’un excellent rapport qualité prix

S.E.H Kelly – Interview

Nous vous avions parlé de S.E.H Kelly il y a un peu moins d’un an. Cette toute jeune marque anglaise a pour particularité, outre le fait qu’ils ne fasse confectionner leurs vêtements qu’au Royaume-Uni, de n’utiliser que des tissus et autres accessoires tissés et fabriqués sur place. Nous avions à l’époque été séduit par une telle démarche, qui a l’intérêt de pousser encore plus loin le concept d’une production locale de vêtement. Bien entendu nous aurions sûrement été moins intéressé si leurs produits ne nous plaisaient pas autant. Nous les avons rencontré il y a peu et leur avons poser quelques questions, l’occasion de revenir sur leur expérience et sur l’avenir de S.E.H Kelly. Cet article est illustré par des images provenant de la section Makers de leur site, mettant en valeur le travail de leur fournisseurs à l’aide de très belles photos. Ici une usine produisant des draps de laine, localisée dans le Yorkshire.

Redingote : Nous pensons que les gens s’intéressent de plus en plus à ce qu’ils consomment. Ils souhaitent savoir d’où viennent ces produits, comment ceux-ci ont été réalisés et par qui. Avez-vous remarqué un tel regain d’intérêt ?

S.E.H Kelly : C’est une des raisons qui nous a poussé à lancer S.E.H Kelly. Nous avions remarqué que les gens commencent doucement à s’intéresser à l’origine des produits. Qui a fait ca ? Et comment ? Est-ce que c’est vraiment de la qualité ? Est-ce qu’ils pourront porter ça toute leur vie ? Ce sont autant de questions auxquelles nous tentons d’apporter des réponses.

C’est pour cela que nos collections sont toutes petites, nous voulions proposer des produits simples, rien de trop guidé par les tendances. Uniquement des pièces que les gens pourront garder et porter durant des années, peu importe ce qui sera à la mode.

Lorsque nous écrivons à propos d’une nouvelle chemise ou d’une nouvelle veste, nous ne décrivons pas vraiment la manière dont celle-ci est cintrée ou comment elle va rendre son propriétaire cool. Nous préférons parler de la provenance du tissu et de ce genre de choses. Nous pensons que c’est plus intéressant, que cela a plus de valeur.

Pour nous il est aussi très important de parler des gens avec qui nous travaillons. Si ils en venaient à cesser leur activité ce serait alors très difficile de relancer cette industrie en Angleterre. Ce serait vraiment une grande perte. Par exemple nous travaillions avec une bonneterie qui a tout simplement disparu lors de nos deux premiers mois d’activité. Du jour au lendemain, nous n’avons plus eu aucune nouvelle d’eux.

Nous aimons particulièrement travailler avec des usines à Londres parce que nous pouvons aller les voir régulièrement : pour les rencontrer, voir ce qu’ils font et s’assurer que le niveau de qualité est conforme à nos attentes. D’autres fabricants avec qui nous travaillons au Royaume-Uni existent depuis des centaines d’années et nous avions travaillé avec eux sur Savile Row, donc nous connaissons leurs méthodes. Certains de leurs employés travaillent là-bas depuis plus de 30 ans, alors nous connaissons effectivement les personnes qui réalisent nos produits.

Ce sont vraiment eux les professionnels. On lit beaucoup de choses à propos des difficultés que rencontre le secteur en ce moment. Ils n’ont pas vraiment besoin de nous en fait. Dernièrement la demande a beaucoup augmenté, beaucoup de marques recommencent à produire au Royaume-Uni.

Redingote : Nous avons remarqué un véritable support pour cette industrie au Royaume-Uni, par exemple la campagne de sensibilisation « Save Our Skills » du magazine Drapers (sorte de « Journal du Textile » anglais). Avez-vous l’impression que les choses ont un peu changé ?

S.E.H Kelly : On a l’impression que beaucoup de marques réalisent que les consommateurs sont intéressés par des prduits premiums faits au Royaume-Uni. Certains de nos fournisseurs ne travaillaient qu’avec des marques traditionnelles, et maintenant les plus grandes chaînes de magasins veulent travailler avec eux. C’est surtout dû au prestige de proposer un produit Made in UK. C’est une très bonne chose pour les usines, nous espérons que cela va continuer.

Redingote : Vous avez décidé de ne travailler qu’avec des tissus ou accessoires provenant du Royaume-Uni . J’imagine que cela a un impact sur vos collections. De quelle manière cette contrainte influence-t-elle vos créations ?

S.E.H Kelly : Il y a des choses que nous ne pouvons pas faire. Certains tissus, par exemple, ne sont tout simplement pas disponibles ici. C’est le cas des tissus techniques mais il est aussi très difficile de faire fabriquer des T-shirt en jersey ici. Il y a peut-être une ou deux usines pour cela, mais elles ont des minimums de quantité élevés, ce que nous ne pouvons pas encore faire. Par contre au Royaume-Uni il est assez facile de trouver de la laine, du lin et de la soie.

Cela peut aussi avoir un bon côté d’être limité ainsi, cela force à être plus créatif. Nous avons été obligé de penser à des manières originales d’utiliser des tissus. Par exemple il est très facile de se procurer de la laine ou du cachemire ici, contrairement au coton ou plus généralement aux tissus pour chemises, c’est pour cela que certaines de nos chemises sont constituées d’un mélange de laine et de cachemire.

Redingote : Nous avons lu que Thomas Mason (un fabricant anglais historique de tissus pour chemises) avait délocalisé sa production ?

S.E.H Kelly : En effet, la production a été délocalisée en Italie. Cela veut dire qu’il nous a fallut réfléchir à d’autres tissus qui fonctionneraient pour fabriquer une belle chemise. Certaines de nos chemises sont bien plus épaisses que d’habitude car elles sont en partie constituées de cachemire. Le lin est toujours très bon au Royaume-Uni alors nous en utilisons aussi pour nos chemises.

Cela nous force aussi à collaborer de manière plus étroite avec nos fournisseurs. Nous avons travaillé sur des tissus exclusifs avec certains fabricants afin d’avoir plus de variété, plus de couleurs. Ce n’est pas quelque chose que nous nous serions embêtés à faire si nous avions eu accès à tous les tissus du monde.

Redingote : Quelle importance a votre expérience sur Savile Row dans votre travail d’aujourd’hui ?

S.E.H Kelly : Je n’ai pas vraiment appliqué les même styles, parce que je travaillais sur des pièces bien plus structurées, certaines plus casuals aussi, mais principalement des costumes. J’étais en charge du développement de produit pour la gamme prêt à porter d’une maison de Savile Row. Cela signifie que les designers m’apportaient leurs créations et que je devais développer les produits avec les usines. Certaines de ces usines sont totalement hors de notre portée maintenant, ils proposent des tissus à plus de 100 £ le mètre. Sur Savile Row il était possible de les utiliser parce que c’était vraiment du très haut de gamme. C’est intéressant parce que nous travaillons maintenant avec les mêmes usines, mais nous utilisons des tissus plus accessibles.

Redingote : Pour l’instant vos produits ne sont disponibles que sur votre site internet. Est-ce que vous projetez d’être distribués en boutique multi-marque ?

S.E.H Kelly : Nous avons discuté avec quelques magasins au début, des magasins dans lesquels nous aimerions bien être maintenant. Nous n’étions juste pas certains de pouvoir faire ceci tout en conservant des prix raisonnables. Nous allons peut-être venir à Capsule à Paris en janvier prochain, mais d’abord il nous faut travailler à diviser notre offre en différentes gammes de prix. Nous pourrons ensuite voir comment distribuer nos produits dans différents magasins.

Redingote : On ressent une forte inspiration workwear derrière votre dernière collection, comment cela va-t-il évoluer ?

S.E.H Kelly : Je pense que nous sommes en train de nous éloigner intuitivement du workwear.

Les produits sur lesquels j’ai travaillé au cours de mon expérience à Savile Row étaient totalement différents, c’était presque l’opposé. Utiliser des tissus et matières premières provenant de ce monde pour les appliquer sur des styles complètement différents était très intéréssant.

Quoiqu’il arrive, nos collections seront toujours composées de produits simples dans des couleurs plutôt neutres.

Pour la prochaine collection, quelques pieces sont influencées par un côté plus tailoring, certaines pièces d’extérieur font penser à certaines des pièces les plus casual sur lesquelles j’ai pu travailler sur Savile Row. Evidemment nous ne metterons pas d’épaulettes ou quoique ce soit de trop structuré, cela restera donc assez proche de ce que nous faisons déjà.

Ce qui est bien avec le workwear c’est l’aspect fonctionnel des pièces : Où disposer les poches ? Quelles profondeur celles-ci doivent-elles avoir ? Mais cela n’est pas uniquement important pour le workwear, et nous pensons constamment à ceci lorsque nous concevons nos collections.