Arpenteur.fr

Relairoute

Depuis le début, Arpenteur fait son bout de chemin dans son coin, avec ses propres règles. Sans trop d’efforts de communication, sans véritable site web, la marque s’est concentrée jusque-là sur le principal : sortir des collections et des produits de qualité, aux influences subtilement mixées et bien ancrés dans la tradition des savoir-faire français. Cette approche semble au final plus efficace que les gesticulations Instagram de certains, car la marque a enchaîné de belles collaborations (Drake’s, Paraboot …) et est aujourd’hui revendue au sein des multimarques les plus exigeants de la planète.

Marc et Laurent, les fondateurs d’Arpenteur, franchissent enfin le pas cette semaine en lançant leur site de e-commerce : arpenteur.fr . Mais fidèle à leur liberté de ton, ils ont sorti un site internet à leur sauce, éloignée des gimmick minimaux et géométriques de l’époque.

Si on se souvient du catastrophique précédent site d’Hermès, qui avait très tôt pris le parti prix d’un site entièrement illustré, Arpenteur a de son côté appliqué son univers visuel au style ligne-clair, et cela sans tomber dans les écueils de son aîné, notamment grâce à une structure simple et lisible.

Ce site réserve quelques bonnes surprises, comme la gamme Arpenteur Tricot, uniquement vendue en ligne ou la section Arpenteur Art, proposant des sérigraphie créées par l’illustrateur Régric pour la marque. Tout cela est complété d’une partie éditoriale nous permettant d’en apprendre plus sur leurs savoir-faire ou leurs collaborateurs.

Arpenteur.fr

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Olivier et sa Cameraman




Olivier et sa chère (ahah) Cameraman, de Nigel Cabourn

 

Salut Olivier, c’est quoi cette veste ?

C’est ma parka Nigel Cabourn, le truc plus résistant que j’ai jamais porté. Avec ça, j’ai l’impression de pouvoir partir à l’assaut de la lande écossaise, même avec un vent de malade et une pluie de taré.

D’où est ce qu’elle vient ? elle a une histoire particulière ?

Je l’ai achetée chez FrenchTrotters, après avoir hésité à vendre un rein pour me l’offrir à New York. Du coup, j’ai sagement épargné, c’est un achat complètement raisonné, et je dois dire que l’idée d’investir dans un vêtement en me disant que je dois en prendre soin me plait bien. C’est exactement la même chose quand tu achètes une paire de Alden : tu sais que tu vas tout faire pour les garder le plus longtemps possible, tu vas les entretenir avec amour, ça n’offre aucune prise au temps. Je trouve que ça permet de développer un rapport affectif à certaines pièces, et par les temps qui courent, ça fait du bien.

Et toi, tu as une histoire vécue avec cette pièce ?

J’aime autant penser à tous les endroits où j’ai vadrouillé avec qu’imaginer tous ceux où je l’emmènerai encore. J’adore l’embarquer en milieu hostile, en forêt, en mer, ou tester son étanchéité en scooter. C’est une pièce qui doit vivre, respirer. A vrai dire, je préfère le grand air aux espaces confinés : en soirée, j’aime pas trop la laisser au vestiaire, j’ai toujours peur qu’il lui arrive une misère.

L’usure du Mackintosh: c’est bien parti pour être vraiment joli.

 

Qu’est ce qui fait que tu l’aimes particulièrement ?

Il y a rien de plus énervant qu’une pièce d’outerwear que tu dois ménager, c’est un comme si t’achetais un parapluie hydrophobe. Du coup, je trouve que c’est le bon alliage entre un vêtement élégant et un vêtement utilitaire (et je dis pas ça parce que le « workwear » revient en force depuis quelques saisons).

Ce qui est amusant c’est que c’est un produit rare mais quand on traîne sur internet on tombe régulièrement sur ce modèle qui impressionne pas mal tous les blogeurs mode qui n’ont pas trouvé assez de partenariats pour pouvoir se la payer. Je sais que tu traines un peu sur les mêmes sites que moi quand il s’agit de vêtements, du coup est ce que ça te dérange de temps en temps ?

C’est vrai que sur les dernières saisons, la Cameraman est l’un des plus gros dénominateurs communs entre blogueurs mode. Mais ça m’arrive souvent de me faire interpeller dans la rue et que des gens reconnaissent la pièce. Pourtant, jusqu’à présent, je l’ai jamais croisée sur les épaules de quelqu’un d’autre. Ce serait assez marrant : on pourrait se faire un high five entre amateurs de belles choses.

Pourquoi ce modèle ci en particulier ?

Si je dis pas de bêtises, Nigel Cabourn avait commencé par ressortir la Cameraman dans une espèce de laine bouillie. Je me souviens qu’à l’époque, je trouvais déjà la pièce magnifique, mais j’étais pas ultra fan de la matière, je trouvais ça un peu convenu. Quand j’ai vu ce mélange Harris Tweed / Mackintosh dans des tonalités similaires, j’ai flashé instantanément. Le Mac traditionnel à moins de 25 ans, c’est un peu compliqué, mais là ça créé une rupture. D’autant plus que c’est une matière qui vieillit merveilleusement bien.

Notez aussi la fun shirt en dessous, l’air de rien.


Qu’est ce que tu aimes ou recherches quand on touche au vêtement ?

Je suis attaché à la culture du vêtement, ce qu’il dit sur son époque, ce à quoi il se rattache. Du coup, mon vestiaire est une sorte de mindmapping où je m’amuse à tracer des liens entre telle et telle pièce. Après, j’aime bien qu’un vêtement dure, parce que je veux qu’il puisse faire partie de moi, au même titre que la musique que j’écoute ou les films que j’aime. C’est pas valable sur tout (j’achète encore des t-shirts American Apparel), mais j’ai besoin d’avoir des sapes qui ne soient pas périssables. Quand tu m’as demandé de choisir ma pièce préférée, j’ai hésité à ramener une vieille paire de Vans Era, quand elles étaient encore fabriquées aux Etats-Unis. Je dois les avoir depuis 6 ou 7 ans, c’est probablement les chaussures que je porte le plus. Elles tiennent bon, mais surtout, ça me rappelle mes premiers « engagements » culturels, quand j’ai commencé à vraiment me rattacher à une communauté (à l’époque, le hardcore de chez Dischord). Si j’avais du les jeter au bout de deux ans, j’aurais jamais pu développer cet attachement.

Qu’est ce que tu penses de la mode en général ?

Disons que j’entretiens un rapport affectif à la mode, et un rapport plus « cérébral » à l’industrie de la mode. En ce moment, j’essaie de me documenter un peu sur la sociologie du vêtement, c’est comme se pencher sur un mouvement musical, littéraire ou cinématographique. J’essaie de me forger un esprit critique, d’avoir une approche épistémologique, ça m’aide à fuir le cycle infernal des saisons. printemps/été, automne/hiver, printemps/été, automne/hiver, et ainsi de suite, ça me fatigue un peu. J’ai envie de savoir pourquoi je porte tel ou tel vêtement, et pas seulement d’un point de vue strictement esthétique.

Vue de dos, parce que la coupe est également très réussie.

 

Quelle marque a particulièrement retenu ton attention ces derniers temps ?

Depuis deux ou trois ans, dans le désordre, et en en oubliant certains, je dirais Our Legacy, Mark McNairy, Engineered Garments et Nanamica. Et Nigel Cabourn, forcément.

Pour toi, est ce que la notion de marque est importante ? qu’est ce que tu recherches chez une marque ?

J’y attache assez peu d’importance, même si j’aime bien les marques qui possèdent une histoire ou une identité forte. En revanche, j’essaie d’identifier ce que je préfère chez telle ou telle marque pour y trouver mon compte : j’adore les coupes de chemise de chez Gitman ou Our Legacy, les chinos de Barena sont impeccables, et j’ai jamais mal aux pieds dans les Paraboot.

Les blogs de mode ou de vêtement à ton avis c’est un bon moyen d’influencer les garde robe par les temps qui courent ?

Je rangerais ça en deux catégories : les blogs qui se contentent de faire de la prescription, qui font office de lookbook, et ceux qui essaient de prendre de la hauteur et d’expliquer pourquoi telle ou telle pièce est vraiment intéressante. Je trouve ça vraiment bien de faire de la pédagogie autour de la mode, qui est souvent perçue comme une religion ultra-normée par ceux qui la font et comme un passe-temps futile par 95% des gens. Le vêtement est une contrainte sociale depuis que l’homme a décidé de ne pas se balader à poil, mais ça n’empêche pas d’y prendre un peu de plaisir.

Olivier est journaliste médias pour Télérama et chroniqueur sur Le Mouv. Il collabore également à Snatch.

Untitled Clothes

Détail d’un imper en Tweed des années 40.

« vintage », « dandy », « hipster », « preppy », « concept store », « sneakers » … vous les connaissez très bien et vous savez que vous les avez déjà trop entendu sortir de toutes les bouches, un peu à toutes les sauces: on a du mal à garder le compte des mots et expressions galvaudés dans la mode et l’univers du vêtement. Ils ont d’ailleurs pour la plupart maintenant perdu toute substance et sont réutilisés à tour de bras par des agences de (mauvais) conseils en marketing pour vendre des opérations flashmob à des marques qui se cherchent un peu (bon ok, ça fait deux fois que l’on tape sur ce truc mais sérieusement, wtf ?).

Là en tombant sur Untitled Clothes, on se dit tout de suite que le nom est bien choisi. « Vêtements sans titres » pour vendre de belles pièces vintage sur internet (sans galvaudage cette fois), c’était assez bien joué. L’expression s’impose: nul besoin de marque ou d’étiquette ornée d’un logo tape à l’oeil, le vêtement parle de lui même. La pièce, âgée mais sans âge, a son caractère propre. L’équipe derrière le projet connaît son produit et celui qui le recherche: le portefeuille du collectionneur ne compte pas, on joue la corde sensible, le point de détail et la touche de patine qui font la différence.

Veste Renault d’époque.

Au delà du nom la passion est quasi palpable, ne serait ce qu’au travers des détails mis en valeurs et la qualité des photos, on sent vraiment que les pièces sont respectées à hauteur de l’intérêt qu’elles pourront représenter pour l’amateur de beaux vêtements. La sélection a d’ailleurs été mise à jour il y a peu, et même si ça n’est que pour regarder, allez vite faire un tour sur le site: certaines des pièces sont réellement incroyables. Ce ne sont pas de simples produits de consommation ou de pures solutions pour lutter contre la chaleur ou la pluie mais de véritables pièces anciennes qui ont une aura bien particulière, du genre de celles que les élégants japonais libres & faciles utilisent pour construire des looks incroyables qui fascinent souvent les hautes sphères des internets.

Un léger point noir peut être dans la punchline « Vêtements anciens pour jeunes contemporains »: je me demande ce que les vieux élégants qui ont perdu Old England cette année vont pouvoir en penser, cette clientèle bien particulière, parfois nostalgique, qui connaît très bien les belles choses. Bien sûr si vous êtes designer ou que vous avez votre marque, ces pièces de collections pourront vous apporter des informations inestimables en terme de connaissance du vêtement.

C’est ce que l’on appelle un joli bouton.

Revoici l’imper de tout à l’heure, zoom out.

Et en entier !

Made & Crafted: online !


Sans réellement nous attarder dessus, nous avions déjà mentionné ici Made & Crafted, la ligne développée par Levi’s XX (la branche premium, plus connue pour s’occuper également de Levi’s Vintage Clothing). La marque Made & Crafted vient donc d’ouvrir son site internet dédié qui présente dès maintenant l’ensemble de la collection pour la saison à venir.

Contrairement à Levi’s Vintage Clothing qui fait dans la reproductions de pièces tirées des archives Levi’s, Made & Crafted s’occupe d’y puiser quelques inspirations pour développer une collection contemporaine. Lancée début 2010, il n’est pas surprenant de voir que la marque ai choisi de laisser un peu de temps s’écouler avant de communiquer, elle avait sûrement besoin de prendre de la distance par rapport à Levi’s Vintage Clothing et trouver une identité propre. La collection à venir, que vous pouvez avoir sous les yeux sur le site, reflète donc parfaitement l’esprit Made & Crafted: les vêtements sont actuels, de belle qualité, et ne viennent pas de nulle part car ils n’oublient pas leurs racines, ce qui assure une bonne cohérence à la série.

Les matériaux utilisés sont beaux, les finitions de bonne qualité et quelques petits détails témoignent de l’esprit inventif derrière la marque: les chemises oxford sont par exemple dotées de boutons réalisés dans le même coton, qui aura donc été simplement compressé; le fond de certaines poches est incurvé par choix esthétique, alors que la réalisation de ces poches est plus compliquée que celle des rectangulaires, le « button down » est caché… bref, un soin particulier est apporté au produit et rien ne semble laissé au hasard.


Le site Made & Crafted présente donc classiquement les collections homme et femme de la marque, renseignera sur les points de vente mais est pourvu d’un onglet « Stories » qui explique très simplement les pièces emblématiques du label et qui devrait être mis à jour régulièrement.

The Rig Out 3

On ne présente plus la boutique en ligne anglaise Oi Polloi et sa sélection pointue. Chose intéressante, Oi polloi publie depuis quelques temps un magazine, mettant en avant leur sélection autour d’articles originaux et de belles photos. Le magasin de Manchester en est à son troisième numéro et la qualité de la publication n’a cessé de s’améliorer depuis la première parution en Juin 2009.

On imagine que The Rig Out est un outil de communication efficace pour véhiculer les valeurs de Oi Polloi, et mettre en scène leur sélection dans un environnement plus « lifestyle ».

De nombreuses entreprises à l’origine des magazines arrivant aujourd’hui sur le marché sont présentes sur trois fronts : la presse, le commerce avec une boutique, et un support internet mixant blog et web-shop. Les trois fonctionnant de manière complémentaire, faisant la promotion des autres, et créant un véritable univers que peut adopter le client.

Alors que les dernières années ont vu se multiplier les marques de vêtement couplées à des labels de musique (APC, Kitsune…), et que la presse traditionnelle semble emboiter le pas à l’industrie du disque en s’inclinant face à l’internet, un nouveau business-model serait en train d’apparaître ? Bien sûr, il est difficile de comparer The Rig Out, Inventory et Monocle car ces entreprises ont des origines diverses et des cœurs de métier qu’on imagine bien différents, cependant il sera intéressant de surveiller leurs évolutions…

Voici quelques images issues du magazine, qu’il sera possible d’acheter au magasin Levi’s Vintage à Paris, ou directement sur le site des auteurs.