Cet été en Yuketen

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Ça fait quelques mois le nom Yuketen résonne de plus en plus sur internet. Il faut dire que la marque aura mis du temps pour sortir de son cercle de connaisseurs initiés: elle existe depuis maintenant plus de 20 ans et il aura fallu attendre le premier numéro d’ INVENTORY pour que Yuki Matsuda (son fondateur) face la couverture d’un magazine occidental. Il est vrai que la distribution de la marque est assez peu développée dans nos contrées, sa base de clientèle étant composée de japonnais fanatiques de manufacture américaine.

C’est d’ailleurs dans la manufacture que se situe la véritable force de Yuketen. Yuki Matsuda, véritable passionné du monde du vêtement, de l’accessoire et des secrets de leurs fabrications, ne se préoccupe pas que d’imaginer les modèles de sa collection: il est également sans cesse à la recherche des meilleurs artisans, s’assurant ainsi de la qualité de sa production et de l’âme de ses produits.

Suite à l’engouement dont ce genre de produit fait l’objet, il était logique de voir la marque se développer, et toucher les meilleurs points de vente du monde. Vous pourrez en effet bientôt retrouver Yuketen chez Très Bien Shop, Oi Polloi, The Bureau pour ne citer qu’eux… les plus  intéressés d’entre vous auront remarqué que FrenchTrotters devrait également accueillir la marque pour l’hiver 2010. Pour l’instant en France il semblerait qu’il y ait quelques pièces chez La Guardia, Marcel Lassance ou le charity shop Merci, ouvert il y a un peu moins d’un an. Oi Polloi vient d’ailleurs de rentrer des modèles de chez Quoddy, pour qui Yuki Matsuda a travaillé avant de se consacrer au développement de Yuketen. La différence entre les deux labels réside d’ailleurs vraiment dans la patte du designer japonais: il se permet beaucoup plus de fantaisie que ses mentors, visant une clientèle moins classique, plus au fait du design. L’amour du savoir faire se ressent par contre très fortement chez les deux chausseurs.

Le plus impressionnant en fin de compte est que la marque est uniquement dirigée par Yuki Matsuda et Ryan Keenan (qui s’occupe justement de la distribution et des contacts avec la presse). Il s’agit donc bien d’une petite marque dont il faudra surveiller l’évolution, sachant qu’elle ne devrait pas cesser de grandir. Elle développe d’ailleurs déjà une ligne de sac, également manufacturée artisanalement…


0 commentaires sur “Cet été en Yuketen

  1. Paul A. :

    Voir des chaussures avec des semelles normales fait plaisir, cela change des semelles toutes plates et affreuses pour le dos de Vans et consorts.
    Par contre, je ne parierai pas sur la durée de vie de ces chaussures dans la mode et les goûts en général.

    • @Paul A. : cela fait tout de même une vingtaine d’années que Yuketen existe et se concentre sur des modèles ayant un fort ancrage dans la culture vestimentaire mondiale (mocassins, bateaux…). Quoddy qui réalise des pièces dans un esprit assez proche est présente sur le marché américain depuis bien plus longtemps, du fait de leur authenticité, ces produits n’ont pas vraiment besoin de la mode pour exister.

  2. Paul A. :

    @ Robin Je suis tout à fait d’accord avec toi pour dire que ces marques n’ont pas besoin de la mode pour exister. Par contre pour se développer c’est quasiment inévitable. A priori, seule la mode est capable d’aller chercher des acheteurs en dehors de leur clientèle traditionnelle. La présence de la marque au salon capsule va dans ce sens.
    Or, tout les phénomènes de mode passent de mode. La marque ne reposant que sur un seul produit, elle va connaître une forte croissance, puis -probablement- une belle dégringolade. Sauf, si elle arrive à relancer son produit.
    Deux exemples:
    – Crocs a presque complètement disparu aujourd’hui, après être passé de l’ombre à la lumière en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire
    – Ugg : pareil, la marque remporte un franc succès malgré les railleries qu’elle suscite, aujourd’hui elle essaye de se relancer en proposant son produit dans d’autres versions.

  3. SK :

    @ Paul A : vous avez raison, pour le buzz, cela passera. Mais en tous cas Quoddy, dont je possède une paire de deck shoes, est une marque qui peut bien s’en passer : c’est une institution aux US, et d’ailleurs de nombreux amateurs américains sont navrés pas la soudaine inflation des prix. C’est un peu le même phénomène pour Alden, une marque traditionnelle très en vue en ce moment parce qu’elle correspond à cette engouement pour la qualité made in USA.
    Je ne connais pas les modèles Yuketen, je ne peux rien dire sur la qualité, mais j’observe l’intérêt grandissant pour cette marque. Ca me fait penser à Engineered Garments.

  4. @ Paul A: effectivement, le buzz s’éteindra. Cependant si on critique souvent le caractère éphémère des phénomènes de mode, il faut garder à l’esprit (comme tu le soulignes) qu’ils permettent aussi de faire découvrir des marques à des consommateurs qui peuvent y adhérer à long terme. Ainsi je crois que la tendance, même si elle s’efface rapidement, contribue au développement de certaines marques sur des périodes plus longues: les nouveaux clients étant séduit par le produit ne l’oubliant pas une fois le buzz éteint. Surtout quand il s’agit de déclinaisons de modèles comme le mocassin ou la chaussure bateau, qui feront toujours partie des gardes robes et qui connaîtront toujours le bénéfice d’ un engouement certain.

    @ SK: Oui effectivement pour Engineered Garments: les deux marques s’inscrivent dans le mouvement désigné comme « Japanese Americana »: des marques de fabrication américaine remises au gout du jour par des designers japonnais.

  5. Paul A. :

    @ Robin: Exact, je n’avais pas pensé à cela. La marque gagne énormément en notoriété et en bruit médiatique, qu’il soit positif ou négatif d’ailleurs. Tout l’enjeu pour elle étant de transformer l’essai, et de fidéliser cette nouvelle clientèle.
    La question est : qu’elle part va en acheter une nouvelle paire, une fois l’engouement passé, et face à un nouvel engouement? Par ailleurs, comme l’a très justement souligné SK, la marque perd également des clients du fait de l’augmentation des prix, qu’elle provoque pour profiter au mieux de sa notoriété. Si elle fait ça, c’est probablement qu’elle y gagne. Pas folle la marque.
    Par contre, elle change d’image, passant de marque d’aficionados qui l’apprécient pour un certain rapport prix qualité physique, à marque de nouveaux clients qui vont l’acheter pour un rapport prix qualité physique et aussi de sens (ce qui donne quelque chose comme: « j’achète des chaussures de qualité, mais comme je cherche des produits relativement exclusifs, je ne vais pas à Décathlon non plus », effet Veblen quand tu nous tient).
    D’où : Peut-être qu’apparaître comme tendance pendant une certaine période est le chemin le plus facile pour monter en gamme très rapidement ? (à creuser)

  6. @ Paul A: effectivement, c’est une excellente question pour poursuivre la réflexion…

  7. SK :

    En tous cas, le deuxième modèle est très réussi, hybride entre la chukka et la deck shoes. Difficile à trouver, on dirait.
    Les autres ressemblent tout de même beaucoup aux quoddy maliseet oxford…
    On peut quand même s’interroger sur l’absence d’un tel phénomène en France. Nous avons des artisans de qualité. Faut-il nous aussi « nos » designers japonais pour relancer ce savoir-faire ? Bon, il y a Kitsuné, bien sûr , mais il ne s’agit pas vraiment d’une tradition proprement française. Et puis c’est hors de prix, sans proportion avec la qualité je trouve.
    Cela bouge un peu, avec Armor lux et surtout Saint James, qui bénéficie d’un mini-buzz à l’étranger curieusement, mais dans l’ensemble ça ronronne. Il y a tant à faire. Je pense à des marques comme Fenestrier, trop confidentielle, Le Glazik , Armor Lux, Saint James et Guy Cotten, qui n’ont rien à envier à SNS Herninig question qualité mais qui pêchent sérieusement côté style, et à tous plein d’autres, y compris les marques ringardisées comme Méphisto ( pas ringard en Angleterre…) ou les pulls de papy Bérac… et tant d’autres…

  8. Paul A. :

    @ Robin : Simplement, pour continuer sur ma lancée, j’ajoute qu’en cas de montée en gamme, l’augmentation de prix n’est pas justifiée d’un point de vue de la qualité du produit. C’est aussi pour cela que ces produits restent peu connus du grand public, leur prix est dissuasif. Parce que tout de même £ 180 pour les Quoddy, cela reste très important pour des chaussures que tu ne portes pas souvent (et encore moins au bureau).

    @ SK: Les marques sont aussi à blâmer, à force de vouloir être authentiques et de qualité, elles en deviennent confidentielles Certaines ne cherchent pas vraiment à se développer en France (Bleu de Paname?), et réduisent volontairement leur marché. C’est leur argument de vente, et justifie le prix (tu payes aussi l’exclusivité).
    Il est difficile de combiner une logique grand public et de chercher à satisfaire des goûts « pointus », les deux images peuvent être contradictoires pour les clients « pointus » qui recherchent des produits rares, et passeront à autre chose s’ils se démocratisent.
    Certaines peuvent y arriver. Je pense à des marques de souliers comme Pierre Corthay, Markowski et Weston lors de ses partenariats. Là, encore une fois, le prix (Corthay et Weston), et la différenciation des produits (vente dans des magasins exclusifs) ne les rendent pas accessibles à tous. American Apparel (pareil pour Uniqlo et Topshop) a réussi à se développer très rapidement avec des prix bas tout en maintenant une image de marque originale auprès du grand public mais l’a perdu pour d’autres clients.

  9. SK :

    @Paul A: 180 £ ! on les trouve à un prix plus raisonnables chez Quoddy ou ailleurs…
    En effet, Quoddy ce n »est pas très urbain. Mais une paire suffit et remplace les baskets en week-end ou en vacances.
    C’est vrai qu’aujourd’hui certains surfent sur la vague du Made In france et de l’artisanal pour pratiquer des prix prohibitifs. C’est un phénomène de « hype », et c’est assez français. Moi je rêve d’un J. Crew en France, à l’opposé de cette conception de mode élitiste et artificielle.
    Rien ne justifie les prix de Bleu de Paname. Il y a une sorte d’inversion : aujourd’hui les vêtement un peu rugeux de « travail » sont plus chers que les produits de plus belle étoffes.

    • @ Paul A. : Il est vrai que Bleu de Paname se veut pointue mais elle est aussi victime du cas français: très peu de bonnes boutiques en dehors de Paris, on en comptera souvent une par ville et encore. Il s’agit également d’une très belle marque: ses produits sont de bonne qualité, l’histoire construite derrière est intéressante et la distribution est impeccable et cohérente, on ne peut pas mettre n’importe où un produit une fois qu’il est chez colette, Starcow ou DSM… tout cela a un prix particulier car on achète un vêtement mais également l’idée que l’on se fait du vêtement (c’est d’ailleurs aussi pour cela que les marques de luxe développent souvent un univers complet autour du vêtement et font des défilés de véritables show). Le vêtement doit laisser une impression.
      De plus ce qui est de fabrication française est souvent assez cher: charges et salaires minimums n’y étant pas pour rien.

      @SK: J.Crew en France serait effectivement une très bonne nouvelle! mais encore une fois je ne sais pas si les règlementations du travail permettent de l’organiser comme aux USA: une fabrication française se répercuterait sur les coûts c’est certain, tandis que l’importation en entraîne également.

      Our Legacy prend un chemin assez intéressant dans cette optique: de bons basiques, de fabrication européenne, a des prix corrects.

      Je suis tout à fait d’accord avec toi en tout cas: il faudrait qu’un designer reprennent les vieilles marques françaises qui ont un héritage parfois assez important. Je dois par contre avouer que parfois porter une pièce plus « pointue » a quelque chose d’assez plaisant, je crois que cela fait un peu partie du jeu, notamment pour les collectionneurs à la recherche de la perle rare.

  10. Paul A. :

    @ Robin : A propos des villes, comme tu l’as dit, je pense que cela dépend surtout de la marque. Pourtant, en maintenant une certaine exclusivité, grâce à la distribution et aux prix, elle se ferme certainement une présence plus importante. Ou ce n’est pas acheté par tout les magasins. A ce titre, les clientèles des villes sont très différentes. Paris est un cas à part grâce à sa taille et à sa diversité, elle peut absorber ses marques, et leur offrir la clientèle qu’elle souhaite. Même si, dans l’ensemble, les choses vont probablement dans le sens de l’uniformisation, il y a encore de solides différences et particularités locales. Ayant habité à Cannes pendant un certain temps, je ne pense pas que des marques comme Bleu de Paname, ou plus généralement celles présentées sur le site y auraient remporté un franc succès. Mais là, je m’avance peut être un peu. Il nous faudrait plus de détails.

    Tu as tout fait raison pour les biens de luxe. Ce sont les biens Veblen : la demande augmente lorsque le prix augmente parce qu’ils sont producteurs de sens. Ils ont une grande capacité ostentatoire. C’est ce que font les marques pointues, le développement de leur identité et de leur code leur permet de produire du sens. Par exemple : A bathing ape n’est pas porté par n’importe qui, à la fois pour des raisons financières, et à la fois parce qu’il faut « savoir » le porter. Chaque marque véhicule une image, sous réserve qu’elle soit accessible sous condition. C’est pourquoi, les marques de grande distribution ne véhiculent pas d’image. Hormis pour leur lignes spéciales, on peut presque dire qu’elles sont neutres. Mais, j’ai l’impression que nous sommes assez d’accord là dessus.
    Il serait intéressant de voir l’identité de certaines marques, et quels sont les relais dont se servent les créateurs pour la faire connaître.

    @ SK : Qu’elles sont les particularités de J. Crew ? Il me semble que Thomas Mahon leur a dessiné une chemise (quelle chance), mais à part cela, j’ai un peu du mal à cerner la marque. Par exemple, par rapport à A.P.C. D’ailleurs où est produit A.P.C. ?

    • @ Paul A : Ahah attention c’est en train de se transformer en cours d’anthropologie de la consommation, on va rendre la matière vraiment rasoir… ayant travaillé dans le monde du retail et de la distribution je te l’accorde, il y a des particularités locales. Il est en tout cas clair que bien des marques rêvent de voir de belles boutiques se monter dans certaines villes où on ne trouve que des sous-jeaneries dans lesquelles il est hors de question pour elles de distribuer leurs produits. Mais effectivement je pense que nous sommes assez d’accord.

      J.Crew est une marque américaine qui travaille essentiellement sur des classiques très abordables fabriqués dans des matériaux de bonnes qualité. Il semble (mais je n’en suis pas sûr) que la majeure partie de la production soit effectuée en chine. Les différences avec A.P.C. sont multiples: au niveau du prix, de l’histoire et de l’image. J.Crew est à la base une marque vendue par correspondance aux USA, qui se veut habiller toute la famille pour un coût raisonnable (sur un jean A.P.C. se situe environ a 60$ de plus).
      Après même si les deux marques travaillent sur des basiques, J.Crew est plus une sorte de LaRedoute version us, tandis qu’A.P.C. reste une marque ayant une image beaucoup plus qualitative, proche du monde de la mode et des créatifs.

      Rapide coup d’oeil à l’étiquette de mon Rescue d’ A.P.C. -> Macau, en Chine donc. Pour ce qui est des jeans en tout cas.

  11. gralles :

    Robin, Paul A : Ah mais ce que dit Paul A. n’est pas rasoir du tout, c’est l’essence même de l’effet « marque » de luxe !
    JCrew, pour moi, c’est un genre d’hybride La redoute + APC. Frank Muytjens est un solide designer au goût certain, rassurant. C’est un peu Touitou au service d’une grande marque. A telle point que pour beaucoup, JCrew est devenu une référence. C’est très anglo-saxon, ce truc : Marc Mc Nairy chez J. Press, et bientôt Alex Carleton, le boss de Rogues Gallery, chez LLBeans, le géant du outdoor !
    La différence, à mon avis, est culturelle : les anglo-saxons font du vêtement pour homme. Pas de la mode comme chez nous.
    APC semble avoir délocalisé une partie de sa production. Longtemps, elle est restée française, ou au moins européenne. Mais j’ai des pièces faîtes en France.
    Je confirme que les marques ne peuvent pas s’implanter dans toutes les villes. Il y a aussi une histoire de culture vêtement locale. Dans le sud, ça prend souvent. Ailleurs, c’est dur. De passage à Rennes, ville de 250 000 habitants, j’ai vu des boutiques essayer de lancer APC. Cela n’a pas pris. Pourtant, APC, vu la dimension que cela a pris à l’étranger…

  12. Bonjour messieurs,
    Très intéressante votre conversation…

    @ Robin: « ses produits sont de bonne qualité, l’histoire construite derrière est intéressante et la distribution est impeccable et cohérente, on ne peut pas mettre n’importe où un produit une fois qu’il est chez colette, Starcow ou DSM… »
    Je ne comprend pas pourquoi vous citez Starcow parmi Colette et DSM. Aucun rapport selon moi…

    • @Anis: Tout simplement parce que Bleu de Paname y a distribué sa première collection…

  13. Baker Bounce :

    JCREW, par rapport à GAP est positionné un peu plus haut de gamme avec une sensibilité plus « traditionnelle ». Ils vendent aussi des vêtements « business » à la différence de GAP qui aujourd’hui ressemble un peu plus à une marque de mode casual internationale. Les 2 sont de très grosses enseignes aux USA. Tout est délocalisé.

    Rien à voir avec APC même si APC prend de plus en plus des allures d’enseigne structurée. Tant au niveau de la production que du design ou du marketing (marketing direct récurent sous formes de cartes postales etc).

    Quels sont les produits APC encore fabriqués en France ? Tout est fait en Tunisie, Europe de l’Est, Chine, Inde je crois.

    • @Baker Bounce: effectivement, mais c’est le privilège des clients d’A.P.C. des premières années, à l’époque les pièces étaient fabriquées en France.

  14. Pingback: Rentrée chez FrenchTrotters | redingote.

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