Husbands – Paris



Un écrin sans fioritures qui s’insère parfaitement dans le quartier.

 

« Quelle promesse implicite fais-je à mon client lorsque je lui propose un vêtement ? ». Pour Nicolas Gabard et Synneve Goode, c’est à ça que se résume le travail d’une marque: répondre à cette question et se plier à ce serment une fois trouvé et formulé.

De leur côté, avec Husbands, l’engagement est de taille: permettre à l’homme de construire sa garde robe parfaite en explorant le patrimoine vestimentaire masculin. Selon eux même si la mode est une réalité dans les habitudes de consommation, l’homme se fiera plus à ses classiques qu’aux derniers modèles extravagants proposés par un designer lambda. Même si on passe notre temps à essayer de les revoir, la durée de certaines pièces dans l’histoire du vestiaire masculin suffit à en dégager des bases solides qui n’ont besoin de ne souffrir d’aucune modifications significatives.

Lors de ma rencontre avec Synneve et Nicolas il m’a évidement fallu lever la première interrogation, la seule question qui me taraudait l’esprit devant cette image de marque si cohérente: pourquoi Husbands ? et du tac au tac de me voir répondre « pour le film de Cassavetes ». Déjà suffisante, la réponse allait pourtant plus loin: « le husband c’est aussi le client, quelqu’un qui existe, qui vit avec le costume ou le vêtement sur le dos, qui est fatigué et qui peut avoir des « bosses » sur le visage » en somme, pas un mannequin au sourire bright d’une pub Dolce Gabbana à qui personne n’a envie de ressembler.

Commencer par une ligne de costumes la construction d’une garde robe sans failles paraissait alors tout naturel: essentiel à tout homme qui se respecte, il donnera de l’allure à son porteur dans n’importe quelle circonstance, qu’il s’agisse d’aller siroter des bières à une terrasse d’automne ou de se rendre à un cocktail guindé dans un quartier chic à la nuit tombée. Le rêve secret de Synneve et Nicolas étant bien sûr qu’il redevienne une habitude vestimentaire qui sortirait de la simple distinction boulot/loisir, parce que l’indétrônable combo t-shirt/jean/basket ne nous donnera jamais autant de classe qu’un pantalon taille haute en flanelle accompagné de sa veste assortie.

Pour apercevoir l’enseigne, il faut vraiment chercher !

 

Si la silhouette recherchée était importante à définir lors de la création d’Husbands, Nicolas et Synneve ne souhaitaient pas s’arrêter là. Amoureux des belles matières, des choses bien faites et respectueux des savoirs faires incroyables associés à la « culture tailleurs », la notion de beaux vêtements n’était donc pas pour eux qu’une question d’esthétique. Or, chez Husbands il fallait faire du beau, dans tous les sens du terme. Nous sommes là encore en présence d’une de ces jeunes ligne qui s’inscrit dans le mouvement du « consommer moins pour consommer mieux », qui loin du simple slogan politico/marketo facile dessine finalement un art de vivre à part entière. Ils sont donc allé chercher des matières incroyables chez les anglais de la maison centenaire Fox Brothers, chez Hields, chez quelques italiens doués pour la flanelle et se sont démenés pour trouver de petits ateliers de façonniers italiens aux mains magiciennes capables de répondre à leurs exigences en terme de qualité et finitions. Les amateurs de costumes iront forcément fouiner du côté de chez Synneve et Nicolas puisqu’ entoilés traditionnellement, leurs modèles ne sont pas victimes de la maladie industrielle du thermocollage, technique de construction du costume très répandue car plus rapide. Ils garantissent de cette façon la durée de leurs pièces dans le temps…

À contre courant de la dynamique notoire de l’industrie de la mode qui créé sans cesse de nouveaux besoins, Husbands revient aux sources de ce qui faisait l’élégance de nos grands parents: pantalons taille haute sans ceinture, matières incroyables qui s’entretiennent bien et qui vivent avec le porteur, finitions et constructions infaillibles qu’un tailleur ou retoucheur pourra vous reprendre sans problème en cas d’accroc malheureux… toutes ces choses que la « fast-fashion » nous a fait oublier durant des folles années de sur-consommation.

La petite boutique sert également de bureau, qui de mieux placé que les esprits derrière les produits pour conseiller le client ?

 

Ça y est, vous avez l’impression d’avoir déjà lu ça des centaines de fois: « basiques intemporels, bien faits, conçus pour durer, dans des matériaux nobles ». Pourtant c’est très rarement que j’ai un coup de coeur pareil à propos d’une jeune marque. J’ai immédiatement été séduit par la démarche et l’esprit du projet, tout autant que par le soin apporté au produit: coupes, stylisme, matières, sizing, confort, tout y est. Si vous cherchez un costume je ne saurai donc que trop vous conseiller de jeter un oeil au 8 rue Manuel dans le 9ème arrondissement de Paris, vous ne serez vraiment pas déçu, tant par les pièces que vous y trouverez que par le contact authentique et agréable de Synneve et Nicolas. Loin des mauvais commerçants qui peuvent parfois faire marchands de tapis en essayant de vous refourguer une veste trop grande pour arrondir leur journée, ils vous parleront avec passion de leur projet, avec attention de votre allure et s’autoriseront même sûrement à tailler le bout de gras à propos de votre roman préféré. Une fois dans la boutique gardez tout de même un oeil sur le cadran de votre montre, il se pourrait bien que le temps y file plus vite que prévu.


Ils sont tous là, prêt à l’essayage.

Un prince de Galle sans chemise blanche ? ne comptez pas sur Husbands.

Une jolie flanelle pour terminer, dépêchez vous d’aller toucher ces étoffes !

Husbands est installé 8 rue Manuel, dans le 9ème arrondissement de Paris.


éclectic – 8 rue Charlot


Un classique bien coupé qui recèle bien des secrets…


Par les temps qui courent, il pourrait paraître un peu étrange d’imaginer une marque de vêtement sans logo. Une marque qui ne se soucierait pas du calendrier des saisons de mode ou encore qui ne tournerait qu’autour d’une pièce et non pas d’une ligne complète, le tout sans chercher à communiquer plus que ça. Finalement ce serait vouloir se placer comme un spécialiste soigné et soucieux de l’allure et des besoins de ses clients plus que comme une marque commerçante cherchant à combler leurs envies fugaces.

Frank Malègue fait un peu ce pari en lançant éclectic l’année dernière, une marque avec laquelle il ne propose que des vestes et de belles pièces à manches. Dès le départ éclectic se positionne comme un spécialiste de la veste en prêt à porter : on fait très attention aux coupes, qui donnent de l’allure en restant près du corps, et également aux matières qui sont  belles, recherchées et agréables au toucher. Alors que la plupart des acteurs versaient l’année dernière dans l’héritage, le retour aux sources et la mode des pièces vintage, Frank Malègue décide avec éclectic de commencer à travailler sur des tissus techniques. Ainsi vous pourrez retrouver des pièces en laines imperméables, d’autres dotées de doublures chauffantes et respirantes ou encore un caban en Cordura indéchirable, spécialement étudié pour sa resistance à l’abrasion.

Veste en laine, doublée en polaire: on est bien.


Soucieux de faire fabriquer des vêtements véritablement beaux, éclectic ne coupe pas les ponts avec l’amour du savoir faire malgré son penchant pour l’innovation. L’ensemble de la collection est donc fabriqué dans un atelier italien du Veneto, à Trévise, qui travaille habituellement avec les grandes maisons de tailleurs: on peut donc compter sur une réalisation de haute qualité. Vous pouvez également le constater avec les quelques clichés qui illustrent mon propos: les finitions sont impeccables (même vraiment très belles, regardez les boutons) et le labeling est des plus discrets.

Boutons en métal lisse, joli contraste chaud/froid d’une direction artistique soignée.

 

Un labeling très discret, témoignage de bon goût.

En terme d’image, Frank Malègue semble vouloir souhaiter que sa marque reste accessible à une population plus large que celle de quelques initiés méticuleux: pour lui, chaque veste peut être portée par des gens différents d’un nombre de manières tout autant différentes. Pour mettre en lumière cet aspect il a lancé le projet photographique « éclectic portraits » qui met en scène des clichés de ses clients, ses proches et ses amis ayant étés photographiés dans la cave de la boutique. Chacun porte une veste éclectic à sa façon et participe à l’image de la marque, le résultat est bien sûr moins diffusé qu’une campagne classique, moins onéreux également mais beaucoup plus authentique, et sur le long terme ça peut donner quelque chose d’assez intéressant.

Rien à craindre avec ça sur le dos, en hiver comme par temps de pluie.


La veste devient alors un élément vraiment remarquable de votre garde-robe, assez décomplexée, un peu à la manière d’un jean que chacun usera et portera selon son look. On s’approprie une pièce multiforme qui devient quasiment une armure, qui protège volontiers du monde extérieur et que l’on pourra adapter à sa silhouette selon ses envies et ses humeurs. On l’envisage également comme une pièce hors du temps, dont on ne se lassera pas au bout d’une saison et qui relèvera avec succès l’épreuve du temps: l’idée du haut de gamme revient à grand pas, mieux vaut avoir une veste incroyable que 10 blazers mal coupés aux finitions juste moyennes que l’on est sûr de croiser à tous les coins de rues. Au pire on pourra la remiser dans un vieux coffre, le temps que vos enfants la trouvent assez cool pour l’enfiler à leurs tours.

Pas de photo maison pour celle ci, mais ça vous donne un aperçu de l’endroit.


Le positionnement luxe de la marque ne serait rien sans un un bel endroit pour lui servir d’écrin. La boutique éclectic est située dans le haut-marais à Paris, au 8 rue Charlot et l’espace joue également la carte du travail bien fait au niveau des matières et des textures (métal brut, pierres apparentes, peintures et plâtres burinés…). Les quelques vestes suspendues ou sur mannequins qui occupent l’endroit y apportent une ambiance chaude assez particulière et en sont les pièces maîtresses: rien ne vient perturber la lecture de la collection, on a tout de suite les yeux rivés sur les vêtement. L’accueil sympathique, ouvert et prompt à la conversation de Frank et de son équipe termine d’en faire un endroit où l’on a une réelle envie d’aller s’habiller. Je vous invite donc vraiment à aller y faire un tour, et surtout à aller essayer les pièces que propose la marque, ne serait ce que pour vous faire une idée du toucher des lainages et autres matières utilisées.

Tricker's – Bottes full brogues Stow

Nous vous avons récemment présenté la maison Tricker’s. Voici un de leurs classiques qui a particulièrement retenu notre attention : les bottes full brogues Stow en chestnut brown.

Ce modèle est parfaitement adapté à la vie en plein air grâce à son cuir traité pour résister à l’eau et à sa semelle à double couche de cuir, ce qui n’empêche en rien de le porter en ville. Ces bottes incarnent parfaitement ce qui a fait la réputation de Tricker’s et qui lui permet de se distinguer des autres grands noms de la chaussure anglaise. Produit du meilleur savoir-faire britannique allié aux matières les plus nobles et solides, ces bottes accompagneront sans aucun doute leur propriétaire pendant de nombreuses saisons et en toutes occasions, à conditions qu’il en prenne soin bien évidemment.

Elles sont disponibles à l’international sur My Wardrobe.

Crédit photo : Amaury Guillais

Harris Tweed – avant

Label de qualité Harris Tweed

Au cours d’une flânerie dans une friperie, vous avez peut-être déjà remarqué cet étrange sigle surmonté d’une croix annonçant fièrement : « Harris Tweed, Tissé main ». Cet insigne désigne la laine constituant la veste ou le manteau qui aurait pu vous intéresser, et plus particulièrement la manière dont elle a été tissée.

Ne vous y trompez pas, Harris Tweed n’est pas une marque mais un label de qualité qui est régi par la « Harris Tweed Authority » et est protégé par acte du parlement écossais. On ne prend pas les choses à la légère en Écosse.

Afin de bien comprendre le passé et le présent de ce prestigieux label, nous aborderons tout d’abord son histoire, puis dans un second article, son application aujourd’hui et les raisons de sa renommée actuelle.

La certification Harris Tweed offre la garantie d’un Tweed tissé à la main par les habitants des îles Hébrides, au Nord Ouest de l’Ecosse, chez eux et finis dans les îles de Harris, Lewis, Uist du Nord, Benbecula, Uist du Sud et Barra ainsi que leurs différentes dépendances (Outer Hébrides) et faite d’une pure laine vierge tannée et filée dans les Outer Hébrides. C’est un peu long, mais il s’agit de la définition légale du Harris Tweed traduite de l’anglais.

Ce tissage est pratiqué par les habitants de ces îles depuis des centaines d’années afin d’affronter les hivers rudes du nord de l’Écosse. Les vestes étaient à la fois chaudes et robustes ce qui en faisaient des vêtements adaptés à la vie de l’île.

La survie des méthodes ancestrales de production a été sauvegardée par la volonté de toute une population. Ils ont choisi de conserver la tradition de leurs îles alors que le continent « succombait » à la révolution industrielle et se munissait de machines à forte capacité de production.

La majorité de la production n’était pas colorée et était utilisée pour la fabrication de vêtement telle quelle. L’autre partie était teinte en utilisant les colorants de végétaux présents sur l’île donnant une palette de couleurs typiques de cette région.

Le nom de Harris vient de l’île des Hébrides portant le même nom. Cette île avec celle de Lewis regroupe la grande majorité de la population de l’archipel (75% en 2001).

Pour ce qui est de l’appellation tweed, elle viendrait d’une erreur de lecture faite par un commerçant londonien d’une lettre venant d’une entreprise écossaise. La confusion s’est faite entre le mot « tweels », qui correspond à un aspect du tissu obtenu par une méthode de tissage particulière, et la rivière Tweed.

tweed

Tisseur de Tweed au travail


Cette confusion a été répétée lors de la commercialisation du produit devenant sa dénomination officielle.

Pendant très longtemps la production de tweed des îles Hébrides était vendue comme toutes les autres productions de ces îles aux habitants du continent.

Ce n’est qu’en 1843 que Lady Catherine Herbert, veuve du Comte de Dunnemore, propriétaire de la région du Nord de Harris, remarqua la qualité de ce tissu. Plus particulièrement celui tissé par les sœurs Paisley qui était d’une qualité bien supérieure à celui produit par les tisseurs non formés.

Tartan de la famille Murray

Tartan de la famille Murray


Elle décida alors de faire tisser plusieurs longueurs de ce tissu par ces sœurs en utilisant le tartan de la famille Murray. Le tissu produit servi ensuite à la fabrication de vestes pour le personnel de son domaine.

La comtesse se prit de passion pour ce tissu qui était à la fois résistant à l’usure et à l’eau et trouva qu’il était parfaitement adapté aux sports d’extérieur pratiqué par l’ensemble de ses amis aristocrates.

Le succès du vêtement s’étendit même jusqu’à gagner l’entourage proche de la reine Victoria.

La comtesse Catherine s’efforça de pérenniser la production du Harris Tweed de haute qualité en faisant évoluer les moyens de production de l’époque et en envoyant des jeunes filles se faire former aux méthodes de tissage.

Le succès du Harris Tweed se propagea rapidement et certaines entreprises du continent écossais se mirent à en produire utilisant l’appellation Harris Tweed.

Cette pratique donna naissance à un des plus longs procès de l’histoire de l’Écosse qui opposa les fabricants des îles à ceux du continent. L’histoire se termina sur une jurisprudence statuant que l’appellation Harris Tweed ne pouvait être utilisée que pour un tweed fait à la main par les habitants des îles Hébrides chez eux, sur l’île.

John Murray, 4ème Comte de Dunmore, fils de la Comtesse Catherine Murray